Coup d'arrêt possible (...)

Coup d’arrêt possible ?du CDD signé qui n’a pas encore débuté

La Chambre sociale de la Cour de cassation a rendu le 15 mars 2017 un arrêt au terme duquel elle amende sa jurisprudence antérieure en matière de contrat de travail à durée déterminée (Cass. soc. 15 mars 2017, n°15-24028).

Par Agnès BALLEREAU-BOYER, Cabinet Capstan, Avocat au Barreau de Grasse

En effet, la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire considère au terme de l’arrêt précité que l’absence de début d’exécution du contrat de travail à durée déterminée donne plein effet à la condition suspensive contractuellement prévue.
Ainsi, par l’effet de cette clause le début d’exécution du contrat se trouve être reporté au jour de la survenance de l’événement.
En conséquence, si l’événement ne se réalise pas le contrat de travail à durée déterminée, pourtant signé par les parties, est réputé n’avoir jamais pris effet.
Rappelons que les cas de recours au contrat de travail à durée déterminée et ses causes de rupture sont strictement encadrés.

En effet, l’article L.1243-1 du Code du travail, dont les dispositions sont d’ordre public, énumère limitativement les situations dans lesquelles le contrat de travail à durée déterminée peut être rompu avant son terme. Il s’agit :
- de l’accord entre les parties
- de la faute grave
- de la force majeure
- de l’inaptitude du salarié dûment constatée par le médecin du travail.

Il en découle que les clauses conventionnelles ou contractuelles dont l’objet viserait à déroger à ces dispositions légales en instituant d’autres causes de rupture sont strictement prohibées.

Pour autant, la condition suspensive contractuelle conditionne désormais l’effectivité du contrat de travail, si dans l’attente de sa réalisation, le contrat de travail n’a pas reçu de commencement d’exécution.

C’est là l’apport de cet arrêt dont les faits sont les suivants :
- Une joueuse professionnelle de basket-ball et une association sportive concluent un premier contrat de travail à durée déterminée allant du 1er juin 2008 au 31 mai 2010.
Avant l’arrivée du terme de ce premier contrat, un second contrat de travail de même nature allant du 1er juin 2010 au 31 mai 2011 est signé le 1er avril 2010 stipulant qu’il ne serait définitif qu’une fois certaines formalités accomplies.
Le 10 octobre 2010, la joueuse professionnelle prenait acte de la rupture du contrat de travail et sollicitait de la juridiction prud’homale qu’elle juge que l’origine de la rupture du contrat devait être imputée à son employeur en raison de manquements de sa part.
La salariée voyait ses demandes être rejetées par la Cour d’appel de Montpellier.
À son tour, la Cour de cassation ne fera pas droit aux prétentions de la joueuse professionnelle en retenant que la Cour d’appel a exactement relevé que si les formalités conditionnant le caractère définitif à ce second contrat de travail ne s’étaient pas réalisées, la joueuse professionnelle n’avait surtout jamais pris ses fonctions, de sorte que le contrat n’avait jamais reçu commencement d’exécution.

En conséquence, la condition suspensive contractuelle jouait son rôle, de sorte que la salariée ne pouvait venir imputer la rupture du contrat de travail à son employeur, puisque ce contrat n’avait pas d’existence.

C’est là toute la différence avec la solution précédemment retenue en 2009 par la Cour de cassation (Cass. soc. 1er juillet 2009, n°08-40023) qui n’avait pas fait produire d’effet à la condition suspensive dans la mesure où le contrat avait reçu un début d’exécution alors même que ladite condition ne s’était pas réalisée.

En conséquence, l’absence de début d’exécution d’un CDD couplée à l’absence de réalisation de la condition suspensive anéantit ainsi l’existence du contrat de travail à durée déterminée.

Ainsi, on ne peut que conseiller, dans l’hypothèse de la conclusion d’un contrat de travail à durée déterminée assorti d’une condition suspensive, de ne pas débuter l’exécution du contrat tant que la condition ne s’est pas réalisée.

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