TVA : et les escargots ?


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5 septembre 2011

Ah non, pas l’hôtellerie de luxe ! D’accord, c’est une position égoïste de provincial. Mais les grands hôtels sont les seuls parcs à thème que le billettiste aime bien fréquenter. Sa suite au Georges V coûte déjà un bras : avec une hausse de la TVA, il ne sera plus question de pourboires. Et l’on perdra l’affection d’Antoine, le talentueux Concierge de la maison, qui ne mérite pas une telle offense. Accessoirement, le renchérissement des lieux pourrait affecter les comptes de l’établissement et ainsi compromettre les finances des propriétaires, les époux Gates. La France veut-elle mettre sur la paille le fondateur de Microsoft ? Priver Bill des moyens de perfuser sa fondation ? L’obliger à vendre son hôtel à McDo ? Déclarer la guerre à l’Oncle Sam ? Non, non, pas de décision précipitée ; il faut éviter les dommages collatéraux irréparables. D’autant qu’une telle mesure rapporterait 930 millions au Trésor, alors qu’il ne manque que 90 millions pour boucler le plan d’urgence du gouvernement. Faudrait pas que Bercy profite de la situation pour se faire du gras sur le dos de Bill Gates – et sur le nôtre, par la même occasion.

En revanche, on est bien d’accord avec l’intention de ponctionner l’hôtellerie, secteur capital dans ce pays qui est devenu un parc d’attractions inégalable pour les touristes du monde entier. Il faut taxer les hôtels miteux : devenus plus chers, ils seront désertés. Leurs tenanciers seront ainsi obligés de les rénover. Ce sera tout bénéf : de l’emploi pour le bâtiment, de la TVA sur les travaux et du bonus pour notre réputation hôtelière. S’il manque un peu d’argent, profitons-en pour majorer de matière sélective le menu des restaurants. On propose une grosse TVA sur les cuisses de grenouille et les escargots, que tous les Rosbifs veulent goûter pour s’encanailler. La matière première devenant rare, il serait normal que son prix soit prohibitif. Autant que les Etrangers paient l’addition. En outre, voilà qui encouragerait le repeuplement de nos campagnes, en suscitant des vocations d’éleveurs de batraciens et de gastéropodes. Et si par extraordinaire ces mesures ne suffisaient pas, il reste à exploiter un plan B dont on garantit l’efficacité : organiser un téléthon auprès des « riches ». Quelques uns de leurs représentants ont imploré l’Elysée d’accepter leurs offrandes, et personne ne les a écoutés. C’est un peu cruel, tout de même. Qu’on permette enfin à ces bonnes âmes de payer des indulgences, et le budget sera bouclé en moins de temps qu’il faut à l’escargot pour razzier les plants de salade que vous venez de mettre en terre. Finalement, c’est plus facile d’être ministre du Budget que d’être jardinier.

La recette du jour

Elevage à la TVA

Vous recherchez un moyen efficace de faire fortune. Renoncez à l’informatique : c’est compliqué et Bill Gates a tout raflé. Pour une poignée de quetsches, achetez un territoire foncier dans une campagne isolée, pluvieuse et donc désertée. Elevez des grenouilles et des escargots, que vous nourrirez d’imprimés de déclaration de TVA : c’est gratuit. Et quand le taux augmentera, vos bestiaux seront plus gras.


Jean-Jacques Jugie