Alerte au schnaps 235


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14 décembre 2011

Eh bien, c’est raté. On comptait cette année faire nos emplettes de fin d’année au marché de Noël de Berlin, où l’on trouve, paraît-il, beaucoup plus de babioles inutiles et ridicules que partout ailleurs. Sauf que l’endroit est devenu périlleux. Le billettiste ne sachant refuser de lever son verre avec des inconnus, il craint de croiser le faux Père Noël qui a déjà empoisonné bon nombre de chalands, en offrant de trinquer avec un schnick de schnaps frelaté. Qui vous démolit les boyaux, vous rend comateux et vous expédie illico à l’hosto. Bon, d’accord, c’est ce que produit d’ordinaire le schnaps authentique sur les autochtones ; mais seulement lorsqu’ils en boivent beaucoup. Tandis que là, un simple gorgeon d’alcool de patates suffit à vous envoyer dans les pommes. Il doit s’agir de schnaps 235, à usage militaire. Le plus dangereux. L’attentat à la gnôle n’a pas été revendiqué. Mais on soupçonne le PNG (le syndicat des Pères Noël Grecs), confronté à un chômage massif par la merkélisation du pays, de chercher une tribune pour leurs revendications. Prudence : ne parlez pas à un inconnu en houppelande sans lui avoir demandé ses papiers. Et refusez de boire à sa gourde avant qu’il en ait lui-même biberonné une lampée.

C’est raté également pour le marché londonien. Pas à cause des terroristes de la City : ils sévissent depuis si longtemps qu’ils ont fini par être repérés. Et encerclés par des occupants indignés. Mais le Père Cameron a empoisonné le dernier sommet européen, en jetant une louche de fiel dans la coupe commune. Refuser un projet de traité qui rend chacun moins dépensier, ce n’est pas très fair-play. Mettre en doute la cohésion de la famille et compromettre sa solvabilité, c’est un nouveau témoignage de perfidie caractérisée. Exiger des contreparties dérogatoires au bénéfice de son secteur financier, c’est faire preuve d’une outrecuidance de gougnafier. Voilà pourquoi on est à regret contraint de négliger l’opportunité du cours avantageux de la livre, qui eût bien arrangé nos finances dévastées. D’autant que l’on comptait offrir à notre banquier un portefeuille en peau de trader, une espèce finalement assez commune, mais protégée par le gouvernement de sa Très Gracieuse Majesté. Il faudra donc se rabattre sur un boulier en peau de crocodile, qui lui boulotera les doigts quand il calculera l’étendue de notre découvert. En période de crise, il faut privilégier les cadeaux utiles.

La recette du jour

Les risques du marché

Vous sacrifiez ordinairement à la coutume du marché de Noël. Vous pouvez cette année vous dispenser d’une épreuve qui vous empoisonne la vie, et que seul le vin chaud rend supportable. Car vous risquez de croiser le dangereux Père Noël berlinois et sa gnôle explosive. Un risque bien plus élevé que celui de claquer vos sous en rossignols rococos et coûteux.


Jean-Jacques Jugie