Inégalités : X>Y


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24 février 2012

Ouf ! Une fois n’est pas coutume, c’est aux Américains que l’on doit une bonne nouvelle. Bonne et capitale. Grâce aux chercheurs du célèbre MIT, une hypothèque sur l’avenir de notre espèce vient d’être levée. En fait, l’hypothèque grevait surtout le mâle. A cause de son chromosome Y, voyez-vous, lequel ne cesse de se racornir. Il y a presque 300 millions d’années, vous vous en souvenez, les deux chromosomes comportaient chacun 650 gènes environ. Depuis lors, les X en comptent environ 800 : c’est qu’ils vont par paire chez le sapiens femelle et peuvent ainsi se combiner. Tandis que le pauvre Y, pétri de solitude, s’est à ce point délité qu’il n’en a plus que 19. Vous avez bien lu : dix-neuf contre huit-cents. La pâtée. Au point que l’on craignait de le voir définitivement tomber en lambeaux, terrassé par la honte de s’être ainsi laissé aller. La fin définitive du mâle et par corollaire la disparition de l’espèce tout entière, vu qu’il finirait par ne naître que des filles. Et l’on ne peut toujours pas se passer des garçons pour faire des lardons. Les mauvaises langues prétendent même que c’est à-peu-près la seule chose qu’ils sachent faire correctement. Ce qui n’est pas complètement exagéré, il faut bien l’avouer.

Les fouines du MIT ont ainsi découvert qu’il ne fallait pas paniquer. Certes, le « Y » ne comporte plus que 19 gènes, mais ils sont sacrément bien protégés. Et cela fait au moins 25 millions d’années que le processus s’est stabilisé. Moins bête qu’il n’y paraît à première vue, ce chromosome solitaire s’est recombiné avec lui-même pour mettre à l’abri les fonctionnalités essentielles – celles qui caractérisent la masculinité, vous l’aviez deviné. C’est en observant l’évolution du macaque que les chercheurs sont parvenus à une telle conclusion. Les deux espèces ont divergé voilà six millions d’années, mais l’ADN de l’homme et du singe ne diffèrent aujourd’hui que d’environ 1%. Sauf que sur le chromosome Y, les différences s’établissent à… 30%. On ne voudrait pas fanfaronner, mais voilà bien la preuve que le mâle humain s’active un max pour s’éloigner le plus loin possible de ses rustiques ancêtres simiesques. D’accord, le résultat n’est pas nécessairement à la hauteur de ses espérances. Voilà pourquoi, mesdames, vous avez souvent l’impression de partager votre vie avec un bestiau mal dégrossi. Qui en plus ne sait même pas grimper aux arbres. Tsss, tsss… En conclusion, mon cher Darwin, c’est plutôt décevant, l’évolution.

La recette du jour

La preuve par Y

Vous êtes un jeune et vigoureux bipède et vous envisagez de fonder une famille. C’est une bonne idée mais il ne faut pas se précipiter. Procédez d’abord à un décompte méticuleux des gènes de votre chromosome Y. Si vous en trouvez plus de 19, faites vous mahométan : votre ADN de choc vous fait mériter plusieurs épouses. A moins de 19, faites vœu de célibat : vous n’engendrerez pas une dynastie. Mais vous gagnerez la paix, qui n’a pas de prix.


Jean-Jacques Jugie