Invasion de robots


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15 mai 2012

Tout finit toujours par s’expliquer. Voilà un bon moment que l’on se demandait pourquoi la presse financière est aussi rébarbative, alors que la finance et l’économie donnent normalement matière à la surprise, à l’imprévu voire au pittoresque : dans la vie réelle, rares sont les événements qui se déroulent exactement tels qu’ils avaient été anticipés. Le Figaro a découvert dans The Guardian le vrai motif de cet ennui conventionnel : les articles ne sont plus écrits par des journalistes mais par des robots. Cette information détonante fait référence au site de Forbes, le magazine qui doit sa célébrité à la publication du palmarès des fortunes mondiales, sans lequel nous ne saurions vivre. Mais Forbes publie aussi, comme bien d’autres, les prévisions de résultats pour les sociétés cotées : telle est la matière favorite des robots, qu’ils rédigent à partir des documents émis par les firmes elles-mêmes. Exactement la même méthode que celle antérieurement utilisée par les journalistes, avec la même absence d’esprit critique et le même renoncement à toute forme de style. Ce pourquoi le public ne peut faire la différence entre la rédaction humaine et son homologue robotique : elles sont d’une médiocrité égale, même si la deuxième est beaucoup moins coûteuse.

A se demander s’il restera bientôt une présence humaine dans le secteur de la finance. Les banques licencient à tour de bras, après avoir installé des robots à la place des guichets, et même des robots à la place des traders (avec les logiciels de trading à haute fréquence). Tout est désormais automatisé et stéréotypé, jusqu’aux réponses à nos récriminations pour prélèvement récurrent de frais abusifs. Et ce n’est pas fini. La technologie permet désormais de faire exprimer des émotions aux machines, si l’on en croit Libération qui a déniché, au Japon, un fessier robotique capable d’exprimer des sentiments. En foi de quoi sera-t-on bientôt accueilli, à certains guichets, par des postérieurs réjouis autrement plus sympas que les actuelles faces de rats. Et puisque ces mécaniques reviennent bien moins cher que les humains, sans doute peut-on escompter que la robotisation gagnera la sphère politique. Apparemment, le processus a déjà commencé.

La recette du jour

Clone R2D2

Vous êtes las du caractère répétitif de votre métier et du peu de reconnaissance que vous en tirez. Faites-vous remplacer par un robot japonais, désormais capable de reproduire fidèlement vos émotions. Exigez simplement que la machine soit construite dans le bon sens, pour éviter qu’elle ne s’assoie sur vos sentiments distingués.


Jean-Jacques Jugie