Paralysie de la raison


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24 mai 2012

Lève-toi et marche. Tel est à-peu-près le message qu’adressent ses dirigeants à une Europe paralytique. Sauf qu’aucun d’entre eux ne dispose des pouvoirs surnaturels qui permettraient le miracle, ni ne proposent une ordonnance crédible pour préparer la convalescence. On ne voudrait fâcher ni les uns ni les autres, mais les faits ont jusqu’à maintenant donné tort aux deux factions opposées : l’austérité n’amène qu’une déprime supplémentaire, un peu plus de douleur et un peu moins d’espoir pour les populations concernées. En face, la relance par de nouveaux emprunts est illusoire dans des économies déjà minées par la dette : aux Etats-Unis, il faut maintenant injecter 3 dollars de dettes pour obtenir 1 dollar de PIB supplémentaire. Autant dire qu’une telle thérapie conduit mécaniquement à l’agonie du malade, au lynchage probable des médecins et à la survenance tout aussi probable d’une chienlit généralisée.

Combien de temps faudra-t-il à l’Union pour admettre cette évidence : il est absolument impossible de rembourser la montagne de dettes qui a été accumulée. Il est donc risible de marteler en toute occasion sa foi dans le maintien de la Grèce au sein de l’Eurozone, dès lors que ce scénario est conditionné au respect, par Athènes, de la « feuille de route » imposée par la Troïka. C’est-à-dire au remboursement de sa dette. Une dette « restructurée », certes, mais encore ridiculement trop élevée. Tout comme celle de l’Espagne, de l’Italie et bientôt celle de la France. Pas étonnant que ces trois pays soient dans le même camp pour défendre la fédération des emprunts, de façon à bénéficier de la garantie des meilleures signatures européennes – comme celle de l’Allemagne, bien entendu, qui vient récemment d’emprunter à un taux voisin de zéro. Il en résulte que les « sommets » européens, qu’ils soient institutionnels ou informels, décisionnaires ou préparatoires, relèvent d’un spectacle qui a perdu toute crédibilité. Et qui n’a donc aucune chance de figurer au palmarès de Cannes.

La recette du jour

Gestion à l’européenne

Voilà plusieurs générations que l’entreprise familiale est gérée sur la foi de sa réputation. C’est-à-dire n’importe comment. Vous avez engagé de nouveaux gestionnaires : les uns épris d’austérité, puis d’autres à la croissance incantatoire. Mais tous plus inefficaces les uns que les autres. Si vous êtes désespéré, essayez de recruter au FMI. Si vous êtes encore lucide, déposez tout de suite le bilan.


Jean-Jacques Jugie