Les vacances d’Hercule Poirot


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31 juillet 2012

Ah bon, vous partez en Bretagne ? Vous avez donc été prudent d’emporter un petit stock de romans policiers, au cas où la météo vous imposerait de squatter le coin du feu. On ne sait jamais : les mauvaises langues prétendent que cette région est la seule qui échappe avec constance aux dérèglements climatiques. Vous allez pouvoir, pour l’occasion, mesurer l’angoisse des auteurs de polars. Au temps des Sherlock Holmes ou des Hercule Poirot, il fallait aux détectives un sens aigu de l’observation, une fine connaissance de la psychologie humaine et des petites cellules grises bien affutées. Désormais, dans l’élucidation des crimes, ce sont les seconds rôles d’autrefois, les faire-valoir un peu ras-du-bonnet, les benêts bien élevés, ce sont les Dr Watson ou les Captain Hastings qui mènent la danse. Il n’est plus nécessaire de reconstituer les faits sur la base d’indices évanescents et de constructions intellectuelles sophistiquées. Plus nécessaire de sonder les profondeurs de l’âme humaine pour en exhumer les traumatismes ineffaçables et les secrets effroyables. Comme celui de Lady Machin, par exemple, qui présente une ressemblance troublante avec le valet de pied de feu Sa Seigneurie de père. Oh my god  !

Aujourd’hui, toute énigme trouve sa solution grâce à la technologie. Des caméras traquent l’intimité du quidam achetant son journal au coin de la rue, ou babillant en terrasse avec une belle inconnue ; des satellites traquent n’importe quel véhicule jusque dans la jungle de l’Auvergne profonde ; des mémoires numériques dénoncent les secrets susurrés dans le téléphone ; des spectromètres et autres bidulomètres dénoncent l’assassin qui a négligé de passer au scanner les lieux de son crime. Si bien que la délinquance se déplace désormais vers les malandrins ingénieux qui parviennent à tromper les machines. En ce moment, par exemple, les spectateurs des Jeux de Londres peuvent payer leurs achats grâce à la technologie « sans contact » de leur téléphone portable. Pratique ? Sans aucun doute. Mais dangereux si l’on en croit la narration du récent congrès de l’informatique tenu à Las Vegas, ce repaire de bandits manchots. Il semblerait que le pillage d’informations soit plus aisé encore que le vol à l’arraché. Et que l’on puisse se faire détrousser de son portefeuille électronique sans contact physique avec le tire-laine. Avis à nos concitoyens qui ont choisi de s’entraîner aux pluies britanniques avant d’affronter les cataractes bretonnes : au retour, leur coffre-fort pourrait bien être vide sans avoir été éventré. Et inutile de sonner Hercule Poirot : il est en vacances.

La recette du jour

Voyage sans risques

Vous êtes un voyageur moderne qui redoute le vol de son portefeuille. Votre prudence vous honore. Mais le recours aux cartes de paiement et autres gadgets sans contact se révèle finalement très risqué. Surtout si vous sillonnez des contrées primitives comme l’Angleterre. Restez chez vous et voyagez autour de votre chambre : personne n’a encore inventé la machine à voler les rêves.


Jean-Jacques Jugie