14 onces de gloire


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16 août 2012

Maintenant que les Jeux sont faits, que les cohortes d’athlètes ont quitté le stade et que les foules enfiévrées ont déserté les gradins anglais ; maintenant que chaque nation a célébré le retour de ses héros, gratifiés d’une grosse couverture médiatique et d’un peu de verroterie en récompense de la fierté qu’ils inspirent ; maintenant que se sont apaisées les querelles de cour de récré que suscite la guerre mondiale quadriennale des chauvinismes rabougris ; maintenant que se pansent les blessures des corps meurtris, des espoir déçus et des tricheries éventées ; maintenant que la fête est finie, que les lampions ont fané et que les confettis ont été balayés, il est temps de passer le témoin aux comptables pour ajuster le bilan de cette nouba géante, de cette méga-teuf musculeuse qui charrie des torrents de sueur et de larmes. En dépit des talents avérés de l’ingénierie financière britannique, capable de transformer une ruine grecque en château en Espagne, il apparaîtra sans doute aucun que ces Jeux laissent au crédit du Royaume une excellente revalorisation de l’ego british, et au débit un monceau de factures douloureuses.

Mais chaque pays fait également ses comptes. Car la moisson de médailles est supposée témoigner du rayonnement sur la scène internationale. Et là, toutes les contorsions statistiques sont autorisées pour se hausser du col. Selon que l’on compare les seules médailles d’or ou toutes les distinctions réunies ; selon que l’on considère les résultats bruts ou qu’ils soient ramenés à la population du pays, à son PIB par habitant ou à l’âge du capitaine. Chez nous, les sportifs ont ramené moins de breloques mais un chouïa de plus de récompenses en or. Encore qu’il faille nuancer l’appellation. Cette année, Londres avait fait fondre les plus lourdes médailles de l’histoire des Jeux : 14 onces (435 g). Mais ce trésor pondéreux ne comporte pas plus d’or que les médailles chinoises précédentes (1/5ème d’once), soit à-peu-près trois fois moins que leurs homologues des années 1900. L’équivalent d’un modeste napoléon : une misère. On veut bien admettre que la gloire du titre olympique soit indépendante du poids et de l’aloi de la médaille. Mais c’est un peu m’as-tu-vu de la part des Anglais d’avoir ainsi forcé le trait sur le bling-bling. Si la France devait à l’avenir accueillir les Jeux et ainsi consolider sa ruine, on suggère de faire frapper des médailles de 3 kg. En nougat de Montélimar.

La recette du jour

Menu olympique

Depuis qu’un célèbre magazine en a fait son slogan, vous êtes sensible au poids des mots. Faites la photo d’un menu ordinaire à la cour de Louis XIV et distribuez-la à vos commensaux. Puis faites servir un bouillon de poireaux et un plat de lentilles, conformes au standing des temps présents. S’ils apprécient l’humour britannique, ils conserveront une forme olympique.


Jean-Jacques Jugie