La cave se rebiffe


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23 janvier 2013

Enfin une bonne nouvelle : on va bientôt pouvoir se fournir en vins chez le pharmacien. Pour peu que le médecin valide notre état de grande fatigue, ou la torture sournoise de nos rhumatismes, on pourra biberonner aux frais de la Sécu. Au moins en partie : pas question de se faire rincer aux grands crus du Bordelais, bien que leurs vertus soient attestées pour combattre les maladies cardiovasculaires. Pour mériter le label de médicament, certaines particularités du vin doivent être renforcées artificiellement. Ce qu’ont réussi des chercheurs australiens en concentrant les polyphénols, dont les qualités anti-inflammatoires sont depuis longtemps reconnues. Ainsi, après une beuverie, les rats arthritiques se mettent à galoper comme de fiers destriers. Les scientifiques espèrent qu’il en sera de même avec l’espèce humaine, bien que ce soit aujourd’hui le contraire : quand il a picolé, l’homo sapiens a plutôt tendance à s’étaler. Mais bon, tout est question de posologie.

De posologie et d’attrait du produit. Car les polyphénols en cause sont directement liés à la présence de tanins, dont l’excès est un véritable calvaire pour le palais. Les chimistes nous assurent que leur vin serait « buvable » - ce qui est un peu court sur pattes pour inciter les malades à se soigner sans y être forcés. On attendra donc patiemment que les alchimistes de la fermentation parviennent à concocter un médicament agréable à déguster – avec une dominante de cabernet-sauvignon, s’il vous plaît. D’autant que le pharmacologue qui a suivi les travaux nous paraît bien peu sûr de lui. «  Le problème est bien évidemment de ne pas faire croire aux gens qu’ils peuvent boire une bouteille par jour » nous dit-il, en pointant le nez vers le bout de ses souliers. Une bouteille par jour ? Ce sont tout juste deux verres par repas, en comptant le petit-déjeuner, bien sûr : on ne peut décemment pas accompagner la brouillade de truffes avec un verre de lait frais. Sont vraiment rustiques, ces Australiens. La norme française du ministère de la Santé recommande de ne pas dépasser une bouteille par repas. Au-delà, en effet, les ennuis commencent : pour soulager son foie, le patient doit démarrer la journée en avalant une ampoule d’extrait de radis noir. On ne peut souhaiter une telle épreuve à son pire ennemi : c’est horriblement nauséabond et franchement imbuvable. Même pour un pharmacien australien.

La recette du jour

Médecines douces

Vous êtes un inconditionnel de l’homéopathie et de Rika Zaraï pour le bain de siège. C’est très bien mais insuffisant pour préserver votre santé. Essayez les extraits de végétaux. Choisissez le pauillac et le margaux pour les soins du cœur, le champagne pour la bonne humeur. Contre l’arthrite et le tennis-elbow, tentez le rouge australien. En cas d’échec, grignotez des champignons psilocybes : ils ne soignent rien mais font halluciner la douleur.


Jean-Jacques Jugie