Gustave la canaille


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8 février 2013

Va-t-on enfin tout savoir sur l’Origine du monde ? Non, il n’est pas question ici de confirmer ou d’invalider la thèse du big bang. Laquelle devrait continuer de faire débat jusqu’à ce que l’on veuille bien admettre l’évidence : c’est une cigogne qui a déposé la Terre dans une rose géante. Il ne s’agit donc pas de cosmologie, mais de peinture. Le propos concerne la célèbre toile de Courbet, la seule au monde où l’allégorie ne nécessite aucune explication de texte : l’intention est aussi visible que le nez au milieu de la figure. Encore qu’il ne s’agisse pas du nez. Ni de la figure. Bref, on aurait découvert la tête qui s’agence avec le reste, la toile étant supposée avoir été tronçonnée pour des raisons encore inexpliquées. Courbet serait ainsi le précurseur des modernes fils de pub : il a d’abord enlevé le haut, et vous connaissez la suite. A moins, diront les langues de vipère, à moins que Courbet n’ait ainsi procédé pour protéger l’identité de son modèle. Qui était probablement Joanna Hiffernan, une Irlandaise alors pacsée avec James Whistler - un peintre américain qui partageait l’amitié et les ambitions esthétiques de Gustave. Et qui aurait également partagé Jo avec lui, mais à l’insu de son plein gré. La rumeur prétend que James aurait identifié sur la toile sa demi-moitié, en dépit du déguisement de Courbet (Jo était notoirement rouquine, de pied en cap). Et qu’il aurait derechef ramené avec lui son dépit aux Etats-Unis, abandonnant le Français et l’Irlandaise à leur commune perfidie.

L’histoire de l’Art ne permet pas toujours de lever les mystères de la création, même si l’artiste sulfureux a dévoilé impunément l’un de ces secrets peccamineux qui empourprent les premiers communiants. C’est la même chose dans des disciplines scientifiques comme la paléontologie. Voilà une trentaine d’années, l’hypothèse était émise que les dinosaures avaient disparu après la chute d’une météorite géante – responsable du méga-cratère de Chicxulub dans les Caraïbes. Les poussières soulevées en cette occasion auraient généralisé la silicose chez les mastodontes. Pourquoi pas, en effet. Une nouvelle équipe de chercheurs prétend maintenant avoir validé la théorie. Car il est désormais possible de dater ces événements : les dinosaures auraient disparu 33.000 ans après la méchante collision. On ne voudrait pas critiquer, faute d’en savoir aussi peu en cosmologie qu’en dinosaurologie. Mais imputer la disparition d’une espèce à un événement qui s’est produit 33.000 ans auparavant, c’est quand même prendre quelques libertés avec la relation de cause à effet. C’est aussi critiquable que de peindre, en secret, le bas de la maîtresse de son copain d’atelier.

La recette du jour

Syndrome de la météorite

Vous aimeriez laisser votre nom à l’histoire de la connaissance, mais votre culture scientifique est aussi efflanquée qu’un bovin éthiopien. Choisissez une discipline aisément assimilable par voie intraveineuse. L’économie, par exemple. Puis énoncez une théorie selon laquelle les désordres présents résultent de la chute d’une météorite sur l’Elysée, voilà cinquante millions d’années. Votre réputation est assurée.


Jean-Jacques Jugie