Les petits Yankees au pilori


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1er mars 2013

Connaissez-vous Daniel Gilbert ? Non, rien de commun avec la dame de la télé en noir et blanc. Dan Gilbert est psychologue, figurez-vous. Et il enseigne à Harvard, une université presque aussi célèbre que les thermes de Chamalières, le Neuilly de Clermont-Ferrand ou naquit Danièle et dont le Maire devint en son temps Président de la République. Revenons à Dan : son sujet de prédilection, c’est le bonheur. Un thème d’étude qui consacre le triomphe de l’hédonisme dans les sociétés postmodernes. L’individualisme nombriliste est donc un sujet de préoccupation très sérieux à Harvard, où la quête du bonheur a supplanté celle du Graal, bien qu’elles soient aussi folkloriques l’une que l’autre. Mais enfin, on ne va pas ergoter : avec les Américains, il faut s’attendre à tout.

A tout, même à la sincérité. Car voyez-vous, les derniers travaux de Dan Gilbert mettent à mal le portrait idéalisé de la famille américaine – celui que tout Yankee se doit d’encadrer sur son bureau, pour ne pas perdre une bribe de sa félicité domestique. Eh bien, on vous le donne en mille : ce bonheur-là n’est qu’une posture. Du flan. Les gens les plus heureux sont ceux qui n’ont pas d’enfants. Intuitivement, on aurait pu le deviner : les mouflets commencent à polluer la vie du ménage dès avant leur naissance, et dans la plupart des cas, ils s’acharnent sur leurs parents jusqu’à l’heure du trépas. Surtout les petits Américains, réputés pour être les enfants les plus mal-élevés de la planète. Cette avancée de la connaissance n’est pas sans conséquences sur l’avenir des States. Le bonheur individuel étant l’alpha et l’oméga du parcours spirituel chez l’Oncle Sam – ce pourquoi les psychanalystes sont aussi nombreux que les avocats -, il en résulte que les générations à venir ne feront plus d’enfants. Pour atteindre leur idéal de vie, les Américains s’apprêtent à sacrifier leur espèce. On ne sait s’il faut le déplorer ou s’en réjouir.

La recette du jour

L’enfance du bonheur

Vous êtes parfaitement conscient qu’élever des enfants emporte pas mal de contraintes. Vous vous en êtes accommodé avec bonhomie et vous n’accusez pas vos mouflets d’avoir écorné votre capital de bonheur. Réjouissez-vous : vous n’êtes par psychologue à Harvard. Ni même Américain. Votre espèce survivra au nombrilisme postmoderne.


Jean-Jacques Jugie