Gil Bernardi : « Les errances d’un pays qui s’escrime à rechercher un consensus »


Politique


29 juillet 2024

Dans cette période politique incertaine, Gil Bernardi, maire du Lavandou, rappelle que «  les lignes bougent et les esprits convergent vers un rejet du monde d’avant  ».

Diffusion d’idées nouvelles, endettement de l’État, crise économique, confusion administrative, remise en question de l’ordre établi et critique des institutions, contestation du pouvoir lui-même…
« Cette société fracturée qui se cherche, entre les courants de la réaction et de la réforme - ceux de l’immobilisme et les forces du mouvement - n’est pas celle dont nous avons connu les hésitations, ressenti les colères, et vécu les vertiges… voilà seulement huit jours… où le peuple de France a été appelé à choisir la voie de son destin démocratique par l’élection de ses Députés… sinon celle de la Révolution française…
Toute ressemblance avec la situation actuelle ne serait que fortuite
 », lance le maire.

ABSOLUTISME

L’élu municipal reprend : « Même si la Liberté et l’Égalité exigées par le peuple de France ressemblent au fil des secousses qui ont récemment soulevé notre société, à celles de la Révolution… Bien que les événements se réfèrent aux mêmes dogmes, aux mêmes mécanismes qui ont animé le changement de l’Ancien Régime ; au cours de quelques mois d’ébullition des esprits, en cette année 1789.
Les idées étaient bien en place, avec les penseurs d’un monde nouveau, allergiques, déjà, à l’absolutisme et à l’arrogance : Rousseau, Voltaire, Sieyès, Beaumarchais, Condorcet - avec les « Jacqueries » dans les Provinces. Comme autant de banlieues en ébullition, et les Clubs comme la presse pour les relayer, de « La Gazette » au « Mercure de France », les Affiches et les articles enflammés de « La Sentinelle du peuple ». A la veille de ces États Généraux si décevants, faute d’obtenir l’écoute du pouvoir royal.
Il n’en fallait pas davantage, pour imaginer des horizons nouveaux, au-delà des trois ordres et fusionnés dans le Tiers-État, pour ressentir la crainte du Pouvoir envers le peuple, pour provoquer ces soulèvements comme autant de traits de génie qui allaient marquer durablement la vie politique, institutionnelle et philosophique de notre Nation, plus de deux siècles durant - mais que sont deux petits siècles, en comparaison avec un millénaire d’absolutisme ? Quelques semaines seulement, pour édifier une œuvre colossale, pour abattre les murs qui enserraient la société féodale : le 5 mai, avec la convocation des États Généraux à Versailles qui se transforment en Assemblée Nationale Constituante »
(…), constate le maire.

CONFRONTATION

Le premier magistrat du Lavandou ajoute : «  L’entier visage de la France dans ses inspirations, dans son organisation, dans sa structuration, a changé radicalement dans la confrontation des idées, entre les Girondins et Montagnards, avec la Convention Nationale du 21 septembre 1792 et la survivance, la permanence de deux tendances, conservatrice et réformiste, jusqu’à nos jours.
Et pourtant, malgré la pacification des débats, cette société nouvelle qui est la nôtre, se cherche de nouveau dans les factions, dans les combinaisons d’appareils et de chapelles, dans les majorités introuvables, dans les alliances de gouvernances improbables qui avaient déjà paralysé notre pays sous la 3e République ! Et sous la 4ème. Avant de trouver un nouvel équilibre sous la 5ème qui laisse à la stature du Chef de l’État, le soin d’arbitrer entre régime présidentiel et régime parlementaire… Un arbitrage convenu avec le système électoral majoritaire qui suppose que le parti politique dominant soit à sa main au Palais Bourbon. Jusqu’à ce que, parfois, le peuple en décide autrement ; et comme lors d’autres consultations, référendaires, celles-là, tranche. Au lendemain de scrutins vertigineux, où la tentation des extrêmes a fait osciller, en quelques jours, les curseurs d’une majorité relative aux deux extrêmes de l’échiquier politique de notre Nation, où l’on s’interroge sur les errances d’un pays qui s’escrime à rechercher un consensus, un gouvernement au centre
 ».

INCERTITUDE

« Dans ce « marais » désormais imprécis, dans un climat où l’on craignait le désengagement des Français pour la chose politique et le droit de vote si chèrement gagné, c’est encore l’incertitude sur notre gouvernance et sur le bon fonctionnement de nos institutions qui alimente les débats dans notre pays. Faut-il s’en émouvoir ? Et relativiser l’exercice comme l’expression du peuple souverain ?
Qu’importent les partis, les combinaisons, les alliances de circonstance - l’essentiel est là, dans le Verbe de Mirabeau : « Vous allez établir un régime social qui se trouvait, il y a peu d’années, au-dessous de nos espérances. Vos lois deviendront celle de l’Europe, si elles sont dignes de vous » !
L’architecture constitutionnelle, la structuration de l’État, dans ses Préfectures et ses Collectivités territoriales - héritées de la Révolution française - feront que la crise politique des Partis, et l’instabilité des coalitions de gouvernement, n’auront que peu de conséquences. Sinon de renforcer le caractère présidentiel de la République, face à la neutralisation du pouvoir parlementaire.
Car la nature - politique - elle aussi, a horreur du vide.
Car les Institutions ne valent que par la qualité des hommes et des femmes qui les servent, certes, mais reposent - encore et toujours - sur la souveraineté de la Nation ; et chacun d’entre nous en est le gardien.
La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789, la Constitution du 3 septembre 1791, bien présente dans celle de 1958, comme dans notre vie politique, sont nos trésors de démocratie, gigantesques, immuables, intemporels, dont les inconstances des scrutins ne sont que graffitis qui ne pourront rien changer au marbre inaltérable. C’est le siècle des Lumières qui continue d’éclairer le pas de la Démocratie d’aujourd’hui.
Passeront les Assemblées, les Régimes, les hoquets de l’Histoire de France, l’œuvre de la Révolution française est éternelle. Terrible, peut-être, mais grandiose
 », conclut Gil Bernardi.


Gilles Carvoyeur