Edito - È (enfin) finita la commedia 


Politique


6 septembre 2024

Dans son edito Jean-Michel Chevalier revient sur la nomination du jour au poste de PM

Xavier Bertrand voulait bien de Matignon, mais il risquait aussitôt un vote de censure de la gauche, du RN et des Ciottistes. Sa nomination risquait donc de nous ramener fissa au point de départ. Bernard Cazeneuve se disait candidat à rien mais prêt à tout. Dans les rangs du PS et de ses anciens amis de gauche, on se préparait déjà à le renvoyer à ses chères études s’il était adoubé par Macron. On aurait pu continuer à l’envi à citer les cas de figures désespérants. Jamais nous n’avons autant touché du doigt les conséquences d’une absence de majorité quand tous les partis, les ambitions et les ego jouent un petit jeu qui n’est pas celui de l’esprit de la Constitution de 1958.


Que n’a-t-on dit de l’hypothèse Thierry Beaudet à Matignon ? Que cet ancien instituteur devenu le patron d’une grande mutuelle et le président du Conseil Économique Social et Environnemental (CESE) n’aurait pas la carrure du poste car il manquerait d’expérience pour mener une barque surchargée de dettes et de mécontentements au milieu de méchants récifs ? Ah bon, parce que Gabriel Attal, 35 ans, ou Jordan Bardella, 28 ans, en auraient davantage ? Cela me fait penser au mépris que la classe politique de l’époque peinait à dissimuler envers René Monory. Il n’était pas énarque mais garagiste à Loudun, avant de devenir président du Sénat. Lui au moins avait mis les mains dans le cambouis et savait concrètement de quoi on parlait quand venait en discussion la marche des entreprises et la création de richesse par le travail...


À ce petit jeu de colin-maillard, c’est finalement Michel Barnier, ancien ministre et ancien commissaire européen, qui est sorti du chapeau. Un homme d’expérience donc, qui devra piloter le vaisseau France sans aucune visibilité, avec des soutes vides et des passagers toujours au bord de la mutinerie. Une nomination qui n’a pu intervenir qu’avec l’assentiment de principe de Marine Le Pen sans qui rien n’eût été possible. Si le RN assure qu’il ne censurera pas Barnier comme il l’aurait fait de façon automatique pour Bertrand ou Cazeneuve, on peut se demander quelles ont été les garanties apportées par le nouveau Premier ministre. Et surtout combien de temps cette bonne volonté apparente du parti d’extrême droite restera à l’œuvre.


Si la loi de 1881 a accordé beaucoup de liberté à la presse, elle prévoyait aussi « en même temps » que les journalistes et les éditeurs aient à rendre des comptes en cas de faute. Elle contribuait ainsi à un éclairage équilibré des lecteurs, permettant à toutes les sensibilités de s’exprimer, avec pour limites l’ordre public, le respect d’autrui et de la vie privée, etc. Aujourd’hui, voit-on les grands réseaux sociaux, dominés par les Américains et les Chinois, répondre des horreurs publiées chaque jour ? Leurs auteurs, corbeaux de l’ère numérique, se cachent courageusement derrière cet anonymat qui leur permet de cracher électroniquement sur la veuve d’un gendarme fauché après un refus d’obtempérer, et mort pour avoir fait son métier.


Vallauris : douleur de perdre sa fillette de 7 ans dans un accident atroce. Aucun mot ne pourra jamais consoler les parents. On leur doit un respect absolu. Mais aussi des explications sur le fonctionnement de la justice. L’appel du parquet sur la remise en liberté sous contrôle judiciaire du motard responsable présumé permettra peut-être au père de Kamilya d’apaiser sa colère à défaut de sa peine.


Jean-Michel Chevalier