Canicules : Nice mise sur le 3-30-300


Environnement


6 septembre 2024

Retour sur la présentation du programme 3/30/300 par le maire de Nice le 29 aoît

« Nous avons l’exigence de végétaliser pour nous protéger »
Afin de réduire les effets de la chaleur lors de canicules de plus en plus nombreuses et intenses, Nice mise sur une végétalisation reposant sur la règle du « 3-30-300 ». Pour Christian Estrosi, l’histoire se répète désormais chaque été avec des « périodes caniculaires qui s’étalent de plus en plus » et « une canicule permanente qui n’est plus l’exception mais qui est la nouvelle norme  ».


©Ville de Nice

Cet été, qui n’est pas terminé, est déjà « nettement au-dessus des normales de saison, avec un grand nombre de nuits tropicales », a précisé le maire de Nice au cours d’une conférence de presse le 29 août. Il a mis en avant le nombre de jours où la température a dépassé les 30°C l’après-midi pendant l’été : 23, soit le plus élevé depuis la canicule de 2003. Face à ce constat accablant, fustigeant l’immobilisme (« Ne pas décider aujourd’hui, ce serait manquer à son devoir » a-t-il assuré), Christian Estrosi a choisi de poursuivre à Nice sa politique de verdissement, acceptant même une « part d’impopularité », en faisant référence aux critiques nées des démolitions de l’ancien TNN et du Palais Acropolis décidées dans le but de permettre l’extension de la « coulée verte » et donc une végétalisation accrue de la cité azuréenne. Afin de renforcer cette politique de l’arbre et du vert, également pour montrer l’exemple en tant que ville organisatrice de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC) l’année prochaine, Nice, par la voix de son maire, vient de s’engager à suivre à la lettre la règle du 3-30-300 émise par le chercheur néerlandais Cecil Konijnendijk, spécialiste des forêts urbaines.

« Pas qu’une politique d’ornement »

L’extension de la coulée verte jusqu’au Palais des expositions se poursuit ©S.G

Selon ce dernier, il faudrait, en ville : que 3 arbres soient visibles depuis n’importe quel domicile, qu’il y ait 30 % de surface arborée dans chaque quartier et que tous les citadins vivent à moins de 300 mètres d’un parc public ou d’un espace vert. « Aujourd’hui nous avons l’exigence de végétaliser pour nous adapter, pour nous protéger  », a déclaré le maire de Nice et président de la métropole Nice Côte d’Azur. « La végétalisation présente de multiples avantages, d’abord pour lutter contre le phénomène d’éponges à chaleur, comme les murs de béton et les sols qui ne recrachent que de la chaleur. Ce n’est pas qu’une politique d’ornement de la ville, c’est tout simplement un choix d’utilité. Nous sommes engagés dans une course contre-la-montre et pour l’instant nous tenons le rythme  ». Le rythme est plutôt bon à en croire une étude interne présentée par Emmanuel Protte, directeur de l’information géographique de la métropole et de la ville de Nice : 92 % des Niçois voient trois arbres depuis leur domicile, 45 % vivent dans un quartier bénéficiant d’au moins 30 % de verdure et 83 % ont accès à moins de 300 mètres à un espace sportif ou à un parc. Et si on cumule les trois critères, cela concerne 37,5 % de la population niçoise. «  On est plutôt dans une situation meilleure que d’autres et sur une trajectoire qui doit nous conduire à être à l’avant-garde », a commenté Christian Estrosi. Cette annonce de l’application du 3-30-300 n’est pas une première. En avril dernier, la métropole de Nantes avait annoncé adopter cette règle pour sa politique de verdissement et à l’étranger, la ville d’Athènes s’est également lancée dans la course.

La végétalisation a des conséquences positives sur la santé

À Nice l’Université étudie les impacts de la nature sur la santé via le projet RespirERA (Santé respiratoire, environnement et vieillissement) ©DR

Présent à côté du maire de Nice pendant la présentation du 3/30/300, Paul Hofman, directeur de l’IHU (institut hospitalo-universitaire) RespirERA, s’est réjoui de cette annonce car il s’agit d’une « action politique concrète ». Il s’est dit « admiratif de l’action de la métropole sur la végétalisation » avant de rappeler que la première cause d’hospitalisation au CHU de Nice était la maladie respiratoire. « Aujourd’hui et demain encore plus  », a-t-il assuré. « Qui dit réchauffement dit absence d’oxygène et impact sur la respiration  », a ajouté le professeur, rappelant les dangers de la pollution atmosphérique sur la santé, avec de nombreuses personnes qui ne fument pas mais qui meurent d’un cancer du poumon. Il y a selon lui trois choses à faire : «  végétaliser la ville, lutter contre la pollution atmosphérique et lutter contre les maladies respiratoires ». « La population doit s’emparer de ce projet  », a-t-il encore déclaré au sujet du 3-30-300. « Il ne faut pas compter que sur les politiques  » et « les jeunes ont un rôle à jouer ». Selon l’Université Côte d’Azur, « lle projet RespirERA (Santé respiratoire, environnement et vieillissement) vise à améliorer le parcours de soin dans le champ des maladies respiratoires. Les objectifs sont de réduire l’incidence des maladies pulmonaires liées à la pollution et à l’âge et l’impact de l’exposome (ensemble des expositions à des facteurs environnementaux), prolonger l’espérance de vie des patients, retarder la dépendance et la progression vers l’insuffisance respiratoire et éviter les hospitalisations  ».

Les prochains points verts de la ville

Une place végétalisée remplacera bientôt le parking près de l’église Jeanne d’Arc. ©S.G

Très prochainement un nouvel espace arboré sera proposé aux Niçois, au-dessus du nouveau parking sous-terrain de 200 places à quelques pas de l’église Jeanne d’Arc. La promenade du Paillon, déjà rallongée en juin par la Bourgada et son belvédère, va poursuivre son extension avec la livraison du parc De Lattre de Tassigny d’ici la fin de l’année puis une livraison globale prévue fin 2025.
Christian Estrosi a expliqué que l’application de la règle du 3-30-300 à la ville de Nice avait permis de mettre à jour des zones qu’il convenait de végétaliser : la place Goiran à Saint-Sylvestre, les quartiers de Notre-Dame, Lépante, Riquier, Saint Roch, Magnan et la plaine du Var. Concernant cette dernière, il a expliqué qu’un grand parc y verrait le jour, avec, selon le calendrier, plusieurs phases de réalisation prévues entre 2026 et 2030. Le maire de Nice a également dévoilé qu’il y aurait un parc de près de 5 ha au niveau du MIN actuel « autour du futur parc des expositions qui se situera sur la seule emprise du MIN fleurs ». Le chercheur Pierre Sicard, qui se consacre aux impacts de la pollution de l’air et du changement climatique sur les écosystèmes forestiers et qui travaille avec l’inventeur du 3-30-300, est intervenu à la fin de la présentation à l’hôtel de ville pour saluer cette action publique mais également pour rappeler la part très importante du privé et donc la nécessité de communiquer auprès des citoyens afin d’encourager les copropriétés à végétaliser. Pierre Sicard a par ailleurs souligné que la zone urbaine de Nice était « la seule zone urbaine du littoral méditerranéen français où la canopée avait augmenté depuis les années 2000 ».


Sébastien Guiné