Pinel : le bilan mitigé de la Cour des comptes


Economie


10 septembre 2024

Les principaux enseignements de l’évaluation rendue par la Cour des comptes

La juridiction financière a passé à la loupe le dispositif Pinel destiné à favoriser l’investissement locatif qui doit s’éteindre à la fin de cette année. Elle a rendu son rapport début septembre.

L’évaluation de la Cour s’est attachée à savoir si ce dispositif avait répondu aux objectifs de construction et de rénovation de logements de qualité et s’il avait bénéficié aux ménages visés.

En voici les principaux enseignements :
- « En près de 40 ans, plusieurs dispositifs fiscaux de soutien à l’investissement locatif privé se sont succédé, voire superposés. Selon l’Insee, depuis le début des années 1980, le parc de logements s’est accru de 1,1 % par an en moyenne en France pour atteindre 36,6 millions d’habitats en 2022 ».
- « Le dispositif Pinel, entré en vigueur le 1er septembre 2014, a entendu promouvoir la construction et la rénovation de logements intermédiaires destinés aux ménages éprouvant des difficultés à se loger dans le secteur privé ou social. Il a succédé au dispositif dit « Duflot », dont il reprend les principaux critères. Dès sa création, cette mesure a visé à répondre à une demande toujours plus importante des ménages. Elle permet aux particuliers investissant dans des logements de bénéficier d’une réduction de leur impôt sur le revenu sous certaines conditions ».

- «  Le dispositif Pinel, conçu pour stimuler l’investissement dans l’immobilier locatif, attire principalement des investisseurs aux revenus élevés en quête d’un outil de défiscalisation. En 2023, le montant cumulé de défiscalisation est estimé à 7,3 Md€ et devrait continuer à croître jusqu’à la fin d’incidence budgétaire du dispositif en 2038, sans que l’administration soit en mesure de présenter à la Cour un chiffrage exact, mais que cette dernière estime à une dépense totale de 10 à 12 Md€ ».

- « Ni la direction générale des finances publiques (DGFiP), ni la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) ne peuvent fournir un chiffre consolidé du nombre de logements construits ou rénovés grâce à ce mécanisme ».??

- « Bien que sa performance soit difficile à mesurer précisément, le dispositif Pinel semble avoir eu un réel effet volume. Très peu utilisée dans le cadre de la rénovation de biens immobiliers, (il) a concerné les logements acquis en vente en l’état futur d’achèvement (VEFA). En matière de requalification urbaine, ou de mixité d’habitat, il a contribué au déclenchement d’opérations immobilières qui n’auraient pu, ou moins rapidement, aboutir sans cette orientation de l’épargne des particuliers. De plus, pour mieux cibler les territoires dans lesquels les besoins de logement sont les plus significatifs, le dispositif Pinel a été recentré sur les zones tendues »

- « Principalement constitué de logements d’une surface moyenne de 57 m², le parc de logements Pinel s’adresse majoritairement à des ménages composés d’une ou deux personnes, dont les revenus correspondent à des plafonds fixés réglementairement. La Cour a pu constater que ceux-ci étaient de fait respectés. Le dispositif permet à des ménages plutôt modestes de se loger en zones tendues dans des logements confortables, qualitatifs et économes en énergie. Il a toutefois été constaté que les plafonds de loyer fixés n’étaient pas toujours fixés de façon pertinente car pouvant correspondre aux loyers pratiqués dans le secteur non aidé. Caractérisé par des durées d’engagement de location de six, neuf ou douze ans, le dispositif Pinel ne peut composer un parc pérenne de logements intermédiaires. Logiquement, les propriétaires bailleurs sont davantage disposés, à l’issue de leur « engagement fiscal », à sortir leur bien du « dispositif Pinel » . La revente du bien, lorsque le marché immobilier est à la hausse, est d’ailleurs très souvent le principal moyen de rendre ce dispositif financièrement rentable pour l’investisseur ».


Jean-Michel Chevalier