Une sénatrice aux côtés des maires face à la prolifération des antennes-relais


Politique


11 octobre 2024

Patricia Demas est aussi présidente de la couverture numérique de la Métropole Nice Côte d’Azur

À l’origine d’une proposition de loi, Patricia Demas se démène pour « donner plus de pouvoirs aux maires et leur permettre de remplir leur mission d’aménageurs du territoire ».

Comment vous êtes-vous emparée de ce sujet ?

Patricia Demas : J’en ai été saisie localement puisque je suis présidente de la couverture numérique de la Métropole Nice Côte d’Azur, depuis fin 2020. Dans le cadre des sujets que je traite, il y a environ un an, plusieurs maires m’ont fait part de leurs difficultés à la suite de demandes d’implantation, de la part d’opérateurs, d’antennes relais sur leur commune, notamment à Saint-André-de-la-Roche, Falicon, Saint-Paul-de-Vence, Tourrettes-sur-Loup et, plus récemment, Tourrette-Levens. Je suis régulièrement saisie de l’impossibilité des maries d’agir. En fait, c’est un aménagement du territoire qui leur échappe complètement.

Le maire de Tourrette-Levens, Bertrand Gasiglia, a parlé il y a quelques jours d’un vide juridique.

Patricia Demas : Il y a un vide juridique. Ce sont les opérateurs qui décident, sauf cas particuliers, comme le New Deal mobile où des concertations sont mises en place à l’initiative du préfet, des maires et des opérateurs. Aujourd’hui, il y a la volonté de déployer des antennes-relais pour la téléphonie mobile à l’échelle nationale et le code des postes et des communications laisse le champ libre aux opérateurs pour pouvoir installer leurs antennes. Selon son article D98-6-1, « l’opérateur fait en sorte, dans la mesure du possible, de partager les sites radioélectriques avec les autres utilisateurs de ces sites ».

Donc personne ne régule ces implantations.

Patricia Demas : Non. Et au regard des témoignages, en tant que sénatrice, j’ai décidé de déposer une proposition de loi, en février 2024, pour cadrer ces implantations. Il y a trois articles dans ma proposition de loi. Le premier article porte sur l’obligation pour l’opérateur de justifier le non-recours à la mutualisation, selon un cahier des charges à définir par voie réglementaire, au moment du dépôt de la demande en mairie par le biais du DIM (dossier d’information mairie). Aujourd’hui, le maire n’a pas la possibilité de cette vérification, sauf cas particuliers. Le deuxième article concerne l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse), avec l’objectif de renforcer ses pouvoirs de police, pour réguler cette prolifération des antennes-relais, et de lui donner aussi les moyens de s’inscrire en juge de paix dans les litiges. Le troisième article permet aux maires de saisir l’Arcep. Cette proposition de loi était faite pour aller vers une mutualisation des antennes-relais et pour donner plus de pouvoirs aux maires et leur permettre de remplir leur mission d’aménageurs du territoire. Aujourd’hui, ils subissent ces implantations et leurs administrés pensent qu’ils en sont responsables.

Où en est aujourd’hui votre travail législatif ?

Patricia Demas : Après avoir rencontré la secrétaire d’État déléguée au numérique (Marina Ferrari), nous avons pu inscrire deux amendements (qui correspondent aux deux premiers articles de la proposition de loi) à l’article 17 du projet de loi de simplification de la vie économique. Ces deux amendements en matière de régulation des antennes-relais ont été votés au Sénat, en juin, à l’unanimité : le premier impose de justifier systématiquement le non-recours à la mutualisation et le deuxième flèche l’Arcep et renforce ses pouvoirs. Le troisième amendement a été « retoqué » car il générait une dépense supplémentaire et en tant que sénateur je ne peux pas créer de dépense supplémentaire. Lors du PLF, je redéposerai un amendement afin de pouvoir doter le budget de l’Arcep de moyens supplémentaires. Dans le discours de politique générale du Premier ministre, évidemment sous réserve de confirmation, j’ai entendu que le projet de loi sur la simplification allait être remis sur la table. Cela laisse un petit espoir. J’ai par ailleurs demandé un rendez-vous avec Clara Chappaz (secrétaire d’État chargée de l’Intelligence artificielle et du Numérique) afin d’avoir des réponses qui sont attendues par les maires.

Propos recueillis par
Sébastien GUINÉ


Sébastien Guiné