François Molins invité à la fac de Droit : 46 ans de magistrature !
- Par Jean-Michel Chevalier --
- le 12 mars 2024
Grosse affluence, ce mardi 12 mars, dans l’amphi 202 de la faculté de Droit et de Science politique de Nice, pour la venue de François Molins. À tel point qu’il a été nécessaire au dernier moment de doubler l’accueil par une retransmission en visio dans une salle voisine tant les professeurs, les enseignants, les personnels et les étudiants étaient venus nombreux écouter la parole de celui qui a été surnommé par les médias « le magistrat le plus célèbre de France ».
Une notoriété qui lui est venue alors qu’il était procureur de la République du Tribunal de Grande Instance de Paris au moment des attentats terroristes qui ont frappé si durement notre pays (1) à Toulouse et Montauban, dans la capitale, à Nice... À la suite de ces événements, il a tenu 55 conférences de presse pour tenir les Français informés de la situation. La plupart étant télévisées, il entra ainsi dans tous les foyers du pays par cette étrange lucarne, devenant soudain un visage connu de tous.
Parrain de la première promotion bilingue
Invité par Florence Crouzatier-Durand, professeure de droit public, François Molins a été accueilli par Xavier Latour. « Il est rare d’accueillir quelqu’un qui a marqué à ce point la vie judiciaire et juridique de notre État. Nous avons la chance de bénéficier de ses réflexions sur la place de la Justice qui est rendue au nom du peuple français » a déclaré le Doyen de la Faculté.
Après lui, le major de promotion des Master de droit public, Gaspard Vallerent, a dit toute son admiration pour la carrière exceptionnelle de François Molins, lequel a consacré 46 ans de sa vie professionnelle à la magistrature. « Je me souviens de la voix professionnelle et rassurante qui faisait le point avec le souci du détail, avec précision » après les attentats déclara l’étudiant qui confia que sa vocation de juriste est née de ces interventions alors qu’il n’avait que onze ans.
François Molins a également été salué et remercié par les étudiants de la première promotion de licence de droit bilingue français-anglais dont il est le parrain.
"La place de la justice dans l’État"
De son ton précis et mesuré, l’invité du jour a disserté sur la place de la justice dans notre pays au moment où celle-ci est souvent remise en cause.
« Nous avons la chance de vivre dans l’une des 34 démocraties du monde, c’est à dire dans un Etat de droit fondé sur un système de valeurs et de liberté » rappela M. Molins. Pour autant, nous ne sommes pas au pays des
Bisounours, et il est toujours délicat de trouver le juste équilibre entre le pouvoir politique, le pouvoir du droit, dans un esprit d’indépendance et d’impartialité.
Ayant eu à connaitre des affaires sensibles - le dossier Cahuzac, le financement de la campagne de Nicolas Sarkozy avec l’affaire Bygmalion, etc.- il a souvent été la cible de critiques venant de tous les horizons de l’échiquier politique, si rapides à condamner une forme de « République des juges » quand le vent judiciaire vient troubler les ambitions.
François Molins a parlé de la séparation des pouvoirs, de la protection nécessaire des magistrats pour un bon fonctionnement de la justice. Si ceux du siège sont inamovibles et ne peuvent être ni révoqués, ni suspendus, ni déplacés, les procureurs quant à eux restent placés sous l’autorité du garde des Sceaux (ce que des syndicats professionnels contestent). Il a aussi évoqué le rôle du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) dont il fut vice-président en sa qualité de procureur général près la cour de Cassation entre 2018 et 2023, expliquant que les magistrats ne sont pas ‘irresponsables’ mais peuvent avoir à répondre pénalement, civilement et disciplinairement. Il a expliqué que lors de sa dernière année d’exercice, quinze poursuites ont été engagées envers des magistrats qui eurent à répondre de divers griefs devant le CSM.
Cette « leçon » de François Molins pourra être poursuivie par la lecture de son livre « Au nom du peuple français » paru chez Flammarion. Un ouvrage de référence pour les étudiants et les professionnels du droit.
J.-M. Ch
(1) Le parquet de Paris a une compétence nationale en matière de terrorisme.