Syrie : le difficile (...)

Syrie : le difficile rapatriement des enfants français nés de djihadistes

Si, pour la France, "les adultes suspectés de crimes doivent être jugés sur place", la question du retour des enfants reste en suspens malgré l’urgence humanitaire

Retours "homéopathiques"
"La France a procédé au retour de dix jeunes enfants français mineurs, orphelins ou cas humanitaires, qui se trouvaient dans des camps du nord-est de la Syrie" a indiqué le ministère des Affaires Étrangères dans un communiqué daté du 21 juin. Ils font désormais l’objet d’un suivi médical particulier et d’une prise en charge par les services sociaux.

Détenus dans des camps
Une trentaine d’enfants a été ramenée depuis l’effondrement de l’état islamique au printemps 2019. Un geste salué par des organisations humanitaires mais qui est considéré comme insuffisant par celles-ci des centaines d’autres attendent encore dans des camps tenus par les Kurdes, lesquels réclament le départ de 12 000 étrangers détenus, ne pouvant leur assurer ni la sécurité, ni des moyens de subsistance.

Doctrine du non-retour
Au début de cette année, Nicole Belloubet avait estimé que les conditions n’étaient pas réunies pour que les combattants impliqués dans des exactions, assassinats, viols etc. soient jugés sur place au
Kurdistan syrien. Elles estimait qu’il valait mieux "les avoir sous contrôle français" - c’est à dire rapatriés et jugés ici - qu’abandonnés à leur sort avec les risques de disparition dans la nature que cela représente.
Elle avait ainsi enfoncé un coin dans la doctrine du "non-retour" qui est la position officielle du gouvernement.

Sur place
La crise sanitaire a depuis éloigné des feux de l’actualité le cas des cent cinquante adultes, hommes et femmes, considérés comme des complices actifs de l’EI et dont la France veut qu’ils soient jugés sur place.

Des avocats s’engagent
Dans une tribune publiée sur FranceInfo le 23 juin, sept avocats impliqués dans la défense du droit de ces enfants rappellent qu’un peu plus de 200 enfants français sont toujours retenus dans ces camps "gangrenés par la violence, la malnutrition, la maladie et la misère" dans une sorte de
"Guantanamo pour enfants" et demandent leur rapatriement ainsi que celui de leurs mères. Les avocats signataires soulignent qu’ils vivent sous la tente depuis des mois - voire des années - et que les deux tiers d’entre-eux ont moins de six ans.

Politique coordonnée
Faisant l’objet d’une information judiciaire antiterroriste, d’un mandat d’arrêt international français, les mères - dont certaines ont déjà été condamnées par défaut à de lourdes peines - doivent faire l’objet "d’une volonté politique de rapatriement" selon David de Pas, coordonnateur des juges antiterroristes français pour être prises en charge judiciairement sur le territoire national.

La responsabilité de la coalition
Le Conseil de l’Europe, le secrétaire général de l’ONU, le Défenseur des droits, la commission nationale consultative des droits de l’Homme, l’Unicef et le Parlement européen appellent les États européens à rapatrier les enfants avec leurs mères tandis que les ministres des Affaires Étrangères des pays engagés dans la coalition contre le terrorisme parlent de "trouver une solution globale".

Bombe à retardement
Le rapatriement qui s’effectue lentement au cas par cas est une évidence humanitaire mais une difficulté "politique" puisqu’une partie de
l’opinion, craignant des bombes à retardement, est opposée à tous les retours, femmes et petits compris. Les enfants, pour la plupart nés sur place, ne sont évidemment pas responsables des agissements de leurs parents, dont un rapatriement est toujours exclu.

Photo de Une (illustration ) DR

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