Du danger de bétonner (...)

Du danger de bétonner à tout prix le chiffre d’affaires...

On ne peut évidemment affirmer ici que Lafarge aurait eu des complaisances douteuses avec des groupes armés de Daesh pour pouvoir continuer à travailler en Irak : la justice est saisie, laissons-là enquêter sereinement pour déterminer si des valises ont changé de mains.
En tout cas, les accusations portées contre cette entreprise sont gravissimes. Bien plus encore que le scandale des moteurs truqués de Volkswagen, qui finalement n’ont abusé "que" des consommateurs et "que" des États ayant été trompés pour verser des primes indues. À côté du scandale né autour du cimentier, VW est tout juste l’auteur d’une blagounette...
Mais avec Lafarge, c’est tout autre chose : sa filiale aurait fricoté avec ceux qui sont venus semer la mort en Europe, en France tout particulièrement. Huit des dirigeants de la multinationale ont déjà été mis en examen pour "financement du terrorisme" et "mise en danger de la vie d’autrui". La semaine passée, un cran supplémentaire a été franchi avec la mise en examen de sa filiale en qualité de "personne morale", mesure assortie d’une caution de 30 millions d’euros. Les chefs d’accusation retenus par l’instruction font mal : "violation d’un embargo", "mise en danger de la vie d’autrui", "financement d’une entreprise terroriste" et "complicité de crimes contre l’humanité".
Si l’entreprise a effectivement fricoté en payant à Daesh un "impôt" pour que ses équipes puissent continuer à produire sans être inquiétées (attaquées), c’est effectivement une faute majeure. Les affaires sont les affaires, elles ne s’encombrent pas toujours de morale.
Lafarge aurait bien sûr dû quitter l’Irak en passant ce marché par pertes plutôt que par profits. Mais cette boîte serait-elle la seule à entretenir des relations avec des gens
infréquentables ? Bien sûr que non.
Tout le monde sait que le commerce international a des pratiques occultes qui jettent par dessus les orties les grands principes. Rien que dans le domaine de la défense, quantité de pays se drapant de vertu n’hésitent pas à vendre des armes sophistiquées à des régimes qui n’offrent pas toutes garanties pour les droits de l’homme.
Cette affaire Lafarge constitue cependant un précédent inégalé qui fait que, désormais, plus rien ne sera comme avant. Même les très puissants groupes industriels savent maintenant qu’ils peuvent être frappés à leur tête par la justice. Cela donne à réfléchir...
Leurs responsables tourneront désormais sept fois leur stylo avant de signer de nouveaux contrats. Bétonner le chiffre d’affaires d’accord, mais plus à n’importe quel prix...

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