Est-il possible d'éviter

Est-il possible d’éviter le naufrage des valeurs européennes ?

Les grands mots échangés entre la France et l’Italie sur fond de crise migratoire n’ont pas accouché de grands remèdes, et les deux pays ne sont pas sortis grandis de ce match à somme vraiment nulle. C’est un "je t’aime moi non plus" qui pourrait être comique, si la situation n’était aussi dramatique.
Après sa croisière erratique en Méditerranée dont on peut être sûr qu’elle ne s’est pas amusée, l’Aquarius a fini par accoster en Espagne pour débarquer sa "cargaison humaine" de 450 hommes, 80 femmes, 89 adolescents et onze enfants de moins de 13 ans récupérés au large de la Libye.
Ceux-là, au moins, ne seront pas morts noyés, s’ils n’ont pas évité avant leur repêchage la violence des passeurs et des milices depuis qu’ils ont quitté leurs pays ravagés par la guerre et la famine.
Comment l’Europe, puissance de 650 millions d’habitants, peut-elle ne rien avoir à proposer à un bateau d’assistance humanitaire ? Comment se fait-il qu’il ne se soit pas trouvé en Europe une autorité morale assez puissante pour convaincre - imposer - une solution dans cette mini crise qui en annonce d’autres ? Le mot de solidarité aurait-il été vidé de tout son sens, et ne serions-nous finalement capables que de parler de nos petits 3% de déficit et de mesures protectionnistes ?
Si l’Europe, qui a elle-même connu sur son sol son lot de guerres et d’exodes, en est arrivée à ce point de renoncement d’elle-même, c’est une faute doublée d’une inquiétude pour l’avenir.
La responsabilité en incombe à nos égoïsmes mieux partagés que les "quotas" de migrants. Depuis des années, Paris, Londres, Berlin (dans une moindre mesure) et les capitales de l’est du continent laissent l’Italie, la Grèce et Malte recevoir sur leurs rivages les vagues successives de migrants. Au mieux, en se fendant d’un chèque pour construire des "centres d’accueil" - notez l’euphémisme - au pire en raccompagnant à la frontière ceux qui tentent leur chance de survie dans un monde qui ne veut manifestement pas d’eux.
Si le voyage de l’Aquarius a cette fois trouvé son épilogue à Valence, rien n’est réglé sur le fond, car bientôt d’autres galères viendront frapper à nos ports puisqu’il y a (heureusement) des ONG qui patrouillent en mer.
Serons-nous capables d’accueillir ces gens sur notre vieux continent vieillissant - île de paix et de prospérité - ou nous apprêtons-nous à les renvoyer vers la Libye où l’on ne sait que trop le sort qui les attend ?

Dans quelques décennies, l’histoire nous jugera et le verdict pourrait bien être sévère...

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