L'école aivancity s'install

L’école aivancity s’installe dans la métropole Nice Côte d’Azur

Hébergée par l’IPAG en attendant son propre campus, « la grande école de l’IA et de la data » orientée business et éthique, va proposer des formations dès janvier.


Tawhid Chtioui, président fondateur d’aivancity, ne perd pas de temps. « L’histoire d’aivancity a commencé un certain 17 mars 2020, le premier jour du confinement, quand on a commencé à travailler sur le projet  », a-t-il confié le 5 septembre lors de l’annonce du lancement à Nice de son école, déjà installée Paris-Cachan. Il se souvient de l’incrédulité (« Une école d’agriculture, pour quoi faire ? Certains pensaient qu’IA c’était pour ingénieurs agronomes… ») et du travail de conviction qu’il a fallu mener auprès des banques, en plein Covid. Mais « 15 mois plus tard, on avait inauguré notre campus de 4000 m² en région Ile-de-France, un des campus les plus innovants de France et on avait une rentrée avec 150 étudiants. Aujourd’hui, l’école compte 400 étudiants, avec 3 000 candidatures chaque année et plus de 500 professionnels qui sont formés aux enjeux de l’IA chaque année  ». Et la formation est déjà reconnue par l’Etat. «  Que de chemin parcouru  ».


©S.G

À Nice, les choses n’ont pas traîné non plus. Séduit par le label 3IA, l’organisation de nombreux événements sur l’IA et par la renommée internationale de Nice, il a définitivement arrêté son choix après la réalisation d’une enquête menée entre mars et juin sur les offres d’emploi à Nice et sa région dans le domaine de l’IA qui en dénombrait plus de 400, dont près de la moitié à distance. De nombreux recruteurs ne trouvent pas de candidats sur place.
Dans quatre mois débuteront les premières formations, au sein de l’IPAG Business school, boulevard Carabacel à Nice : une formation certifiante IA et data science pour les managers, mi-janvier et fin janvier ; un master data engineering & cloud computing en alternance et un master data management en alternance, en janvier. Un bachelor IA appliquée et un master Intelligence for business suivront en octobre 2025.

« Impact positif »

En revanche, pour le futur campus niçois, Tawhid Chtioui compte prendre son temps. Ce ne sera d’ailleurs pas forcément à Nice. « On vise 2 000 m2 minimum. On a déjà quelques options sur lesquelles on est en train de travailler. On regarde sur toute la métropole. J’espère que d’ici mars 2025 on pourra avoir une idée claire du lieu où on s’installera ». Pour une ouverture prévue en 2029 ou 2030. Comme pour son campus de Cachan, il souhaite quelque chose «  d’atypique », avec « une pédagogie interactive, très ouverte et des espaces qui ne ressemblent pas à des espaces d’enseignements classiques. On essaie d’être un démonstrateur, d’incarner l’IA ».
Tawhid Chtioui avance également qu’aivancity n’est pas une école de l’IA comme les autres. Elle est « hybride  », alliant technologie, business et éthique. « Pour nous, l’enjeu essentiel de cette grande révolution dont tout le monde parle est d’abord économique et sociétal et on se trompe si on pense que l’enjeu de l’IA est technologique. Il suffit de regarder la révolution Internet qui est juste celle qui précède : les meilleurs acteurs au monde aujourd’hui ne sont pas ceux qui ont la ‘techno’ mais ceux qui ont réussi à créer de l’activité économique derrière ».
Société à mission, aivancity s’appuie sur quatre valeurs fondamentales : l’employabilité (avec une garantie à vie des mises à jour du diplôme ; concept breveté), la responsabilité, la diversité (40 % de femmes, 30 % de boursiers et une diversité dans le recrutement avec des étudiants venant de philosophie) et l’ancrage territorial. « Ce qu’on veut, c’est être une école qui forme des diplômés qui ont un impact positif sur la société, qui vont faire que cette IA soit une IA de la confiance et de la responsabilité  », souligne son président fondateur, rappelant qu’il y a 25% de sciences humaines et sociales dans les enseignements. Christian Estrosi ne pouvait lui que se réjouir de cette nouvelle implantation après l’arrivée récente de l’école de jeux vidéo ISART Digital et la reprise tout aussi récente de l’Ecole 42 Nice par la CCI Nice Côte d’Azur. «  Cette annonce va peser lourd sur l’attractivité de notre métropole », a-t-il commenté, convaincu par le discours du président d’aivancity.

Vue du campus de Cachan aivancity ©aivancity

« Smart data » contre « big data »

«  Quand on parle d’impact écologique c’est vrai qu’on a tendance à parler de data mais cela ne représente que 10 à 15 % de l’impact énergétique global du numérique. La plus grande partie de l’impact écologique c’est plus le matériel, les ordinateurs et les téléphones, que la partie data », explique d’abord Tawhid Chtioui quand on l’interroge sur le coût environnemental de l’IA et sur la nécessaire sensibilisation de ses étudiants. «  Ensuite, il y a un sujet très important pour nous, et d’ailleurs c’est dans notre présentation : on ne parle pas de big data, on parle de smart data », poursuit-il. « Il y a toute une logique de l’IA jusqu’à maintenant qui est de dire : on collecte les données sans considérer leur pertinence et on laisse les algorithmes faire le travail. Ce n’est pas du tout notre approche. On dit à nos étudiants : il faut sélectionner les données les plus pertinentes parce qu’il y a une logique d’impact énergétique. Il faut d’abord pouvoir penser la data pour avoir quasiment les mêmes résultats qu’avant mais avec une logique plus respectueuse de l’environnement. On essaie de faire bouger la méthodologie du ‘big’ vers le ‘smart’  ».
Le président d’aivancity ne s’arrête pas là : « Et il y a une autre dimension très importante pour nous, c’est la consommation énergétique des objets connectés. On essaie d’utiliser de l’énergie renouvelable pour alimenter les objets qui eux alimentent l’IA en data. Un quart des enseignements sont autour de ces sujets-là dans l’école. On leur accorde vraiment une importance majeure. De toutes façons, cela évolue tellement vite que le droit ne pourra pas suivre l’évolution de l’IA… Donc il faut des principes  ».

La France « en retard » sur l’acculturation

Si la France n’est plus à la traîne en termes de développement, de recherche et de formation, elle l’est toujours dans l’acculturation, selon le président d’aivancity. « On a démarré tard mais on se rattrape bien  », expose-t-il. «  On n’était pas dans le Top 20 il y a cinq ans et aujourd’hui la France est la sixième nation mondiale en matière d’IA, derrière les Etats-Unis, la Chine, la Grande-Bretagne, l’Inde et l’Allemagne. Avec le plan France 2030, tous les investissements mis en place et l’attractivité de la France pour un certain nombre de grandes entreprises, la France a pu retrouver une bonne position. On se rattrape bien sur la formation et sur la recherche. Là où on est en retard par contre, c’est sur l’acculturation à l’IA. Sur le fait d’intégrer l’IA dans tous les métiers : le designer, l’avocat, l’architecte, le médecin, le sportif, l’artiste… Tout est touché pour l’IA. Il y a une résistance à l’IA qui est plus forte en France, une acceptabilité de l’IA qui est plus faible. C’est pour cela que la dimension éthique est importance parce qu’on rassure et on va permettre aux gens d’y aller avec un peu plus de confiance  ».
Et de rappeler, peut-être avec un peu cynisme mais beaucoup de réalisme : «  De toutes façons si vous ne le faites pas, quelqu’un d’autre à l’autre bout du monde le fera. Et il sera beaucoup moins cher ». Et d’asséner : « Ce n’est pas l’IA qui prendra votre travail mais celui qui la maîtrisera  ».

Visuel de Une - Tawhid Chtiou ©DR

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