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L’interprofession à l’épreuve des nouvelles technologies

Les nouvelles technologies ont profondément modifié le quotidien des Avocats, des Huissiers et des Experts-Comptables. Nouveaux enjeux, nouvelles formes d’exercice, nouvelles pratiques… Le point cette semaine sur les bouleversements rencontrés par les professions du droit et du chiffre à l’ère du digital.

Cap sur la dématérialisation


Pour la plupart des professionnels du droit et du chiffre, la dématérialisation apparaît comme une nécessité écologique et économique, compte tenu de la quantité de flux échangés aujourd’hui.

Largement engagés dans la dématérialisation, les Experts-Comptables ont choisi justement de mettre les technologies numériques à l’ordre du jour de leur prochain Congrès à l’automne.

« La dématérialisation des pièces comptables s’opère de plus en plus, avance Alexandre Poletti, Expert-Comptable à Nice. Ce que souhaitent nos clients aujourd’hui, c’est d’avoir leur comptabilité à jour et disponible de suite. De plus en plus, nos clients génèrent eux-mêmes des factures, ce qui nous permet de récupérer ces écritures et de les mettre directement en comptabilité. Grâce à la GED (Gestion Electronique des Documents), nous scannons et référençons les documents, ce qui nous permet un accès beaucoup plus rapide aux pièces, d’un simple clic ». Fini aussi les paquets de factures et l’archivage des pièces ! Et ce n’est pas tout : grâce à Signexpert, l’équivalent de la signature électronique certifiée, les documents dématérialisés en provenance des cabinets d’expertise comptable peuvent désormais être authentifiés et certifiés. Une application qui devrait permettre, selon l’expert-comptable, à la dématérialisation de se généraliser encore davantage, si les clients suivent et emboîtent le pas. « Ce qui prend du temps, c’est de les sensibiliser car ils ont l’habitude du papier ».

Chez les Avocats et les Huissiers aussi, la dématérialisation est en marche.

Depuis 2007, le Réseau Privé Virtuel des Avocats (RPVA), interconnecté avec le RPVJ (Réseau Privé Virtuel de la Justice), leur permet d’échanger par voie électronique. Pour pouvoir l’utiliser, ils doivent demander une clef électronique sécurisée et nominative. « Cette clef cryptée permet d’assurer l’authentification de l’avocat qui utilise le RPVA afin d’éviter tout risque de piratage, explique Maître Caminiti Avocat au Barreau de Nice. Une fois connectés, nous pouvons suivre l’état des procédures sans avoir à nous déplacer. Les avantages de cette plateforme : l’accélération des délais de traitement des documents, et pour le client un meilleur suivi des affaires avec une transmission instantanée des informations relatives aux procédures ».

Comme les Avocats, les Huissiers ont aussi leur propre plateforme de communication, le RPSH (Réseau Privé Sécurisé Huissiers).

Et côté dématérialisation, deux outils leur facilitent grandement la vie : Ficoba, le Fichier Central des Comptes Bancaires, et le SIV, Système d’Immatriculation des Véhicules.
Le premier, détenu par la Direction Générale des Finances Publiques, recense l’ensemble des comptes ouverts en France par des personnes physiques ou morales. « Ainsi, l’Huissier peut obtenir directement de l’administration fiscale l’adresse des organismes auprès desquels un compte est ouvert au nom du débiteur et le saisir, explique Romain Ghiandai, Huissier de Justice à Menton. Quant au SIV (Système d’Immatriculation des Véhicules), il nous permet de faire des demandes d’informations sur les véhicules des débiteurs. La réponse du Ministère de l’Intérieur se fait sous 24h sous la forme d’une liste de véhicules détenus par le débiteur. Nous pouvons ainsi, grâce à ce dispositif, procéder à la déclaration valant saisie du véhicule directement, sans nous déplacer en Préfecture, en générant un acte qui bloque la carte grise. Nous pouvons aussi désormais signifier nos actes de manière numérique, ce qui constitue un gain de temps formidable ».

Les Huissiers et le constat vidéo

Il est l’un des exemples les plus parlants de l’utilité des nouvelles technologies dans le quotidien des professionnels du droit. Jusqu’à il y a peu, les Huissiers dressaient leurs constats sur un Procès-Verbal, illustré au besoin par des photographies.
Désormais, il existe le constat vidéo. « On l’utilise beaucoup dans le BTP et dans le cadre des constatations avant travaux de voirie. Avant, il fallait prendre des clichés de chaque fissure, ou élément suspect. Désormais, la caméra nous permet de balayer chaque mur de clôture, chaque façade, sans rien oublier, dans le but de décomposer image par image la cause exacte du problème. Surtout, il n’y a pas de mise en scène possible : on rend compte de la situation telle qu’elle est, contrairement à la photo où, selon l’angle de prise de vue, le rendu ne sera pas le même. Nous livrons ensuite le constat sous forme de CDRom ou DVD, ce qui évite des frais d’expertise et de contre-expertise en cas de problème, des déplacements sur site, et du temps perdu ! Le constat vidéo peut être utile aussi quand on a affaire à des maisons avec beaucoup de meubles car cela évite de prendre des photos de chaque objet présent ».
Là encore, à la clef : gain de temps et économies.

L’e-acte d’avocat est né !


Nouveauté 2015 : le lancement national via la plateforme e-Barreau de l’acte d’Avocat électronique, entièrement dématérialisé, depuis sa création jusqu’à son archivage. Concrètement, l’acte est rédigé avec les clients comme avant. Puis l’Avocat se connecte à e-Barreau et dépose l’acte avec toutes ses annexes sur un parapheur électronique. L’acte complet est alors scellé et signé électroniquement par le client avant d’être contresigné par l’Avocat. L’acte est ainsi infalsifiable et inviolable. « Il est, de plus, économique (plus de transports par coursier, tout se fait derrière un ordinateur) et écologique car il permet de limiter considérablement la consommation de papier ! ».

Des cabinets d’Avocat virtuels ?

De nouvelles formes d’exercice voient le jour sous l’effet des nouvelles technologies et l’une des plus remarquables d’entre elles concerne l’apparition de Cabinets d’Avocats virtuels.
Leurs principales caractéristiques ? Une maîtrise des coûts via l’externalisation et le télétravail (la féminisation de la profession d’Avocat n’est pas étrangère à ces nouveaux modes d’exercice), ainsi qu’une utilisation massive des technologies de l’information (mail, dématérialisation des documents) afin de faciliter les échanges avec les clients et les partenaires de justice.

Les nouvelles applications au quotidien


Maître Caminiti est formel : pour rechercher des arrêts inédits ou une jurisprudence compliquée, l’outil Internet est précieux ! Pourquoi ? « Car c’est d’abord la notion de temps réel et d’instantanéité qui a modifié l’approche des clients par rapport à notre profession et leurs besoins juridiques, explique Maître Caminiti. Les clients veulent désormais être informés en temps réel, ce qui oblige l’Avocat à modifier ses propres modes de communication et à aller vite ». De même, avec la synchronisation des logiciels avec la messagerie instantanée, plus possible de manquer une audience ! De son côté, Romain Ghiandai reconnaît volontiers que son smartphone lui vient en aide à des fins professionnelles. « Je m’en sers pour tout : photos, vidéos, dictaphone pour dicter mes comptes-rendus, agenda électronique qui synchronise mes RDV, pour géolocaliser le débiteur à qui on signifie l’acte… Cela me permet de gagner un temps précieux et d’être plus performant sur le terrain ».

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