La médiation économique,

La médiation économique, une révolution silencieuse et discrète

  • le 16 juillet 2015

Alternative aux recours en justice, la médiation économique, qui inclut la médiation commerciale, gagne du terrain. Cet outil, proposé notamment par les CCI, permet aux entreprises de résoudre un différend avec une aide extérieure, en toute impartialité et confidentialité. Souplesse du cadre, libre engagement des parties, maîtrise du coût et du temps : décryptage par Frédéric Roussel, Notaire à Lille et Vice-Président de la « CAREN- Médiation et arbitrage » .

La médiation vise essentiellement à aider des partenaires professionnels à trouver une solution à une situation conflictuelle, ou en passe de le devenir, entre associés, entre clients et fournisseurs, en situation de concurrence déloyale, afin de s’assurer le respect de l’image, de la marque, d’un process...

A noter : si la médiation est sollicitée en cours de procédure judiciaire (devant le tribunal de commerce), elle conserve son caractère économique, mais on parle de médiation judiciaire.

En théorie, la nature de la relation est fondée sur un rapport d’intérêts financiers lesquels font l’objet du différend. En pratique, la dégradation de la relation économique peut avoir provoqué des réactions affectives qui auraient rendu plus complexe le dénouement du différend.

Le rôle du médiateur ?
Il s’agit pour lui d’apaiser les relations entre les parties, de conduire les débats dans un climat de sérénité, de faciliter une négociation - laquelle peut déboucher sur une rupture ou le rétablissement d’un nouveau partenariat - et d’accompagner la rédaction d’un accord qui pourra rester dans le champ contractuel privé ou faire l’objet d’une validation par un juriste (avocat, notaire) ou d’une homologation par un juge.

Mode alternatif de résolution des conflits

En cas de conflit avec un fournisseur, un client, si on exclut le procès, long, et porté sur la place publique ; si l’on n’en est pas au point de la nécessité d’un arbitrage, donc d’une décision prise à l’encontre de l’une ou l’autre partie, la médiation s’impose ! C’est un mode alternatif de résolution des conflits par le dialogue. On n’est pas obligé de parler de droit, mais bien des motifs qui permettraient de régler le litige, dans le but, notamment, de poursuivre les relations professionnelles.

Comment s’engage-t-on dans une médiation ?
Il faut d’abord rappeler que coexistent deux formes de médiation : la médiation ad’hoc, et la médiation institutionnelle. Cette dernière est organisée, de manière à éviter toute erreur de procédure, toute erreur dans le choix du médiateur. L’institution – ici la CAREN – impose un règlement pour que les parties se sentent en confiance, et sachent où elles vont, ne serait-ce qu’en ce qui concerne le coût. On peut se référer aux conditions générales de vente, qui le prévoient de plus en plus, comme on peut saisir directement le centre de médiation. On peut prévoir dans les contrats privés le recours à la médiation. Au cours d’une instance judiciaire, un juge peut proposer aux parties une médiation si celles-ci l’acceptent.

Qui nomme le médiateur ?
Le médiateur est nommé par les parties. Mais si c’est la CAREN, par exemple, qui est directement saisie, c’est elle qui propose un médiateur, en fonction du type de litige, de son importance, de sa technicité, de l’urgence qui s’attache à la résolution du différend…

Qui peut être médiateur ?
C’est d’abord et avant tout une personne indépendante et impartiale. Le médiateur peut être membre de l’une des professions représentées à la CAREN (avocat, notaire, expert-comptable), mais aussi un expert dans un domaine particulier, du monde de l’entreprise, de la magistrature professionnelle ou non-professionnelle (prud’hommes, tribunaux de commerce…). Il doit cependant avoir reçu une formation de médiateur, et être agréé.

Les parties peuvent-elles se voir sans le médiateur ?
Oui bien entendu, puisque le but de la médiation est de s’entendre ! Si le médiateur, dès la première séance, trouve avec les parties et leurs conseils une solution acceptable, elles peuvent décider de poursuivre seules, L’idée demeure celle de s’arranger, pas de se battre.

Y a-t-il un timing, un délai ?
Le délai doit être court. C’est la clé du succès de la médiation. Cela peut aller de quelques jours à deux mois (maximum, selon le règlement de la CAREN) à compter du jour où le médiateur est investi de sa mission. Si ce dernier a le sentiment que celle-ci ne pourra se dérouler dans ce bref délai, c’est sans doute que les parties n’ont pas choisi la bonne voie de droit. Il ne faut pas non plus que la médiation soit un moyen pour l’une des parties de faire perdre du temps à l’autre partie ! Cela s’appelle une mesure dilatoire, et elle est peu appréciée des entrepreneurs.

Combien coûte une médiation ?
Le règlement d’arbitrage et de médiation de la CAREN prévoit une grille tarifaire maîtrisée. Pour la médiation, le coût est essentiellement celui du médiateur, payé à l’heure d’intervention. Ainsi, il n’est pas rare qu’une médiation ait un coût inférieur à 500 euros HT, outre des frais administratifs de 150 euros HT.

Peut-on être accompagné dans la médiation ?
Il est possible de se faire assister, dans cette démarche, par son conseil habituel (avocat, notaire, expert-comptable...). Il va de soi que les avocats sont formés à la procédure, et que le respect du contradictoire sera l’assurance d’une médiation réussie.

Comment se matérialise et s’exécute l’accord ?
L’accord trouvé reste confidentiel. Mais rien n’interdit de l’écrire. Voire de lui donner force exécutoire, par exemple dans un acte notarié, ou par homologation du tribunal de commerce.

La Médiation inter-entreprises : une alternative insuffisamment connue

Ce dispositif gouvernemental d’aide aux entreprises qui rencontrent des difficultés contractuelles ou relationnelles avec un client ou un fournisseur (gratuit et totalement confidentiel), a été créé en avril 2010.

La médiation peut être individuelle (une entreprise contre son fournisseur ou son client), collective (plusieurs entreprises peuvent se regrouper si elles rencontrent les mêmes difficultés vis-à-vis d’un même client ou fournisseur) ; ou de branche (une branche professionnelle contre un autre secteur d’activité). Des entreprises peuvent également entrer en médiation par l’intermédiaire de leur fédération professionnelle ou syndicat.

Le non-respect des délais de paiement (règlement au-delà du délai légal, retard volontaire de facturation...) constitue la principale cause de recours à la Médiation inter-entreprises. Suivent la rupture brutale de contrat ou des modifications unilatérales, le détournement de propriété intellectuelle. Egalement, les contrats à prix ferme sans prise en compte des fluctuations des matières premières, les pénalités de retard abusives, des modalités de commandes inaceptables...

Qu’elle soit « institutionnelle » au sens de la CAREN, ou au sens du dispositif gouvernemental, la médiation économique n’est pas un effet de mode.

Elle doit contribuer à désengorger particulièrement les tribunaux de commerce. Elle doit surtout permettre aux entreprises de poursuivre leurs relations économiques, dans la mesure du possible. Nous sommes ici dans le droit de la paix, et non dans le droit de la guerre !

La CAREN

La CAREN est une institution internationale d’arbitrage créée à Lille par des spécialistes du droit, sous l’impulsion des milieux économiques et juridiques. Des personnalités et des organisations belges, italiennes, allemandes, anglaises, néerlandaises, espagnoles, portugaises et françaises, y sont associées.

Elle pratique principalement l’Arbitrage c’est-à-dire un des modes alternatifs de règlement des conflits (A.D.R. : Alternative Dispute Resolution) sans avoir recours aux juridictions étatiques

La CAREN organise et surveille les Arbitrages mais s’emploie également à concilier les parties par la conciliation dans l’arbitrage.
http://www.caren-adr.org

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