Mon voisin techno-paysan

Mon voisin techno-paysan et son engin spatial...

Tout le monde a le mot innovation à la bouche. On le déguste à toutes les sauces, avec la promesse d’emplois et de progrès. Mais c’est aussi un mot aussi très théorique, qui évoque davantage qu’il ne montre de choses concrètes. Sauf pour les visiteurs du... Salon de l’agriculture, qui vient de fermer ses portes. Au hasard des stands, entre la vache montbéliarde en robe tachetée et la rousse d’Aquitaine dans sa tenue unie, ils ont pu découvrir que les paysans sont aussi... de fameux geeks !
Car le fruit des recherches effectuées à Sophia (et en Californie, ne soyons pas chauvins), on le retrouve en application sur des tracteurs high tech qui n’ont plus rien à voir avec les fameux "petits gris" s’époumonant dans les champs à la fin des années 50. Aux commandes de ces engins modernes aussi carénés que la Batmobile, aussi puissants que la fusée Ariane (on exagère un peu, mais c’est pour la démonstration...), nos paysans du bas Berry et de nos belles provinces labourent, sèment, traitent avec un œil sur leur propriété et un autre sur les écrans d’ordinateur.
Dans la mémoire de la machine, toute la parcelle en data, avec ses spécificités. Le drone qui l’a survolée la connaît mieux que notre agriculteur le fond de sa poche : ici, il a reniflé la présence d’humidité, là celle de chardon, ailleurs une pente mal exposée, des cailloux, des bestioles indésirables... Toutes ces informations sont embarquées, l’ordinateur les traite et déclenche les bons traitements, à la bonne dose, au bon moment et au bon endroit. Plus de pulvérisation généralisée et inutile, pas de gâchis, des économies, avec la certitude d’avoir toujours le réglage juste et la solution idoine.
Ces machines formidables sont bien sûr géolocalisées. En plus de l’assistance à la "conduite" dans les champs, cela permet aux agriculteurs de louer le tracteur ou la moissonneuse batteuse disponible la plus proche.
Il y a déjà vingt ans, notre techno paysan avait été le premier à s’équiper de caméras pour une "vidéo surveillance" de ses étables à l’époque des naissances. En pleine nuit, il voyait déjà à distance s’il fallait se lever pour "y aller" ou s’il pouvait poursuivre son roupillon tranquille-pépère sur ses deux oreilles.
On n’en est pas (encore ?) à la reconnaissance faciale des brebis et des porcelets, mais des étiquettes électroniques les identifient encore plus sûrement que leur propre mère (et la CNIL qui ne voit rien alors qu’il y aurait à redire, mais bon...).
Chez le maraîcher, c’est un robot autonome de la taille d’un chien qui examine la pousse des plantes, détecte la présence de nuisibles, enlève les mauvaises herbes, arrose juste ce qu’il faut et fait la récolte (adieu lumbago !).
Tous ces progrès au pays du riche laboureur qui fit venir ses enfants et leur parla sans témoins.
En informatique, à l’évidence, l’agriculteur en sait plus que beaucoup d’urbains qui, eux aussi, travaillent sur des écrans. Alors la prochaine fois que je tombe en panne d’ordinateur, c’est sûr, j’appelle mon voisin paysan pour me dépanner !

Post-scriptum : Édouard Philippe active le 49.3. Est-ce le début de la République en Marge ?

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