Montagne : la fréquentatio

Montagne : la fréquentation atteint des sommets

Vert. C’est la couleur du moment dans le haut-pays. Celle des paysages en ce début d’été. Et celle des voyants de la fréquentation touristique.

"Nous observons une très belle affluence depuis le 27 juin", relève Lionel Fernandez, directeur de l’office de tourisme d’Isola 2000. "Les principaux hébergeurs affichent un taux de remplissage qui atteint 60% de l’offre globale, ce qui constitue un excellent chiffre en période estivale". La saison 2019 avait déjà été fameuse pour la station de la Haute-Tinée. 2020 semble promise au même avenir.

Un effet Covid indéniable

La fréquentation est importante dans les stations et aux abords des principaux villages (ici Saint-Martin-Vésubie). Mais la quête du grand air peut poser des problèmes de préservation de la nature. DR Lionel Lecourtier

"Les Azuréens composent la base de notre clientèle traditionnelle, mais ils ne sont pas seuls à avoir répondu à l’appel de la montagne". Lionel Fernandez y voit la conjonction de plusieurs facteurs : "Il y a bien sûr l’effet de la gratuité des remontées mécaniques initiée dans les stations du Mercantour par le syndicat mixte. Elle s’ajoute à une mesure prise cette année par l’office de tourisme qui a décidé d’offrir le premier accès aux différents loisirs qu’il gère comme l’escalade, le tir à l’arc, l’escape game...".
Les incitations ont joué le rôle attendu dans le contexte actuel de crise sanitaire. "Il est indéniable que la Covid a poussé les gens à monter en altitude, où ils ont la sensation que les grands espaces sont un gage de sécurité".
Le constat se confirme à La Colmiane, où les passages au point d’information touristique sont en hausse de 20% par rapport à l’été dernier. "Dès l’ouverture, le 6 juin, nous avons ressenti ce besoin de grand air", indique Yannick Garin, qui dirige la station.
"Aujourd’hui, nous constatons une belle augmentation des préréservations des activités, ce qui se traduit par un rebond de 5 à 10% de la fréquentation réelle".
Non loin de là, à Saint-Martin-Vésubie, cette présence humaine pléthorique laisse cependant un goût amer, comme le souligne la responsable du
bureau touristique : "Contrairement aux échos peu réjouissants que nous avons de nos confrères sur la Côte, l’afflux est important dans notre vallée. Malheureusement, il n’est pas vraiment profitable à l’ensemble de l’économie du village, car, et c’est sans doute un effet de la Covid, les touristes réservent en priorité des meublés dans lesquels ils peuvent être autonomes". Et Marjorie Meinesz de regretter : "Finalement, les hôtels sont loin d’être pris d’assaut en semaine".

De nouveaux adeptes de la montagne

Autre conséquence du coronavirus, "nous accueillons cet été une population nouvelle qui, à l’inverse des habitués, n’a pas toujours conscience des usages respectueux que la nature impose". Parmi ces "néo-montagnards", on compte des adeptes du camping sauvage et nombre de randonneurs qui ignorent les règles de protection en vigueur dans le Parc national du Mercantour. Certains sentiers et sites déjà habituellement très prisés sont plus courus que de raison. "Nous y avons observé beaucoup d’incivilités. C’est le cas notamment aux abords des lacs de Trécolpas et de Prals, où, certains jours, on se croirait à la plage. C’est du jamais vu".

Fortement espérée à l’orée des beaux jours, la copieuse transhumance touristique post-confinement draine des bienfaits plutôt contrastés.

Refuges : un été à oublier

Le refuge de Rabuons, dans la Haute-Tinée, a souffert des répercussions de la crise sanitaire et d’un éboulement qui l’a rendu inaccessible jusqu’au 18 juillet. DR J.P

Il y a du monde en montagne. Mais la manne populaire n’est pas forcément économique, comme en témoigne la situation très délicate dans les refuges d’altitude. Ces hébergements singuliers, situés au cœur de la nature, parfois à plusieurs heures de marche de la première trace de bitume, subissent de plein fouet la crise sanitaire. "Cloisons amovibles pour distancier les groupes d’occupants, réduction des capacités, suppression du linge de lit, affichage des gestes barrière..., nous avons pourtant pris des mesures pour assurer un accueil serein des randonneurs, mais la crainte de la Covid modifie les habitudes", explique Robert Ravaioli, président du Club Alpin Français (CAF) Nice Mercantour, l’association qui gère ces établissements dans les Alpes-Maritimes. "Les sentiers sont fréquentés mais les refuges délaissés". Déjà en chute libre au lendemain d’un confinement qui a privé le CAF de ses clients randonneurs à ski, le bilan des nuitées affiche "une perte colossale. Au 20 juillet, la fréquentation a dégringolé de 80 %".

Photo de Une : Le haut-pays bénéficie d’un effet post-confinement. Randonnée,
pique-nique, loisirs dans les stations..., la montagne est prise d’assaut. DR J.P

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