Deux A, quatre pattes

Deux A, quatre pattes

Après avoir été conspuées pour la médiocrité de leurs prévisions et la partialité de leurs avis rémunérés, après avoir été accusées de tirer sur les ambulances et ainsi de favoriser la traque des emprunteurs blessés, après avoir été convaincues de comploter sans vergogne contre les intérêts européens, les agences de notation sont en train de se refaire une santé. Non que leurs méthodes aient changé au point de devenir opérantes : la prévision relève toujours du bricolage statistique sur des modèles ésotériques, c’est-à-dire du pifométrisme mis en équations. Non que les conflits d’intérêt aient disparu de leur univers : la sphère financière ne prospère que grâce aux conflits d’intérêt et aux informations d’initiés. Mais les Agences travaillent maintenant leur timing : elles publient une note connue de tous au moment exact où les marchés l’attendent. Elles apportent leur dose d’adrénaline quand le cœur boursier menace de flancher. En témoigne, hier, l’annonce de Moody’s, qui aligne sa notation de la France sur celle de Standard & Poors : le CAC 40 s’est propulsé de presque 3%. On peut s’étonner que les inquiétudes sur la signature française suscitent l’enthousiasme des Boursiers. En fait, le contexte justifie la baisse de l’euro par rapport au dollar, ce qui est une bénédiction pour les firmes européennes.

Telle est l’équation à résoudre pour parvenir à la compétitivité, cet idéal que tous les Etats poursuivent dans l’acharnement thérapeutique et sous des contraintes épineuses : il faut réduire les coûts sans désespérer Billancourt, et faire baisser la monnaie sans irriter les créanciers. L’exercice est délicat, on s’en doute. Mais il semble bien que toutes les grandes nations soient engagées à fond dans la guerre monétaire, consistant à déprécier suffisamment leur devise pour tailler des croupières commerciales aux concurrents. Les Etats-Unis ne réussissent pas trop mal, merci pour eux. Mais les Japonais vont reprendre l’offensive en accélérant les rotatives à billets : désormais, quand la température est trop élevée, on modifie les graduations du thermomètre pour rafraîchir l’atmosphère. Il suffit alors de redéfinir des objectifs en rapport avec ses capacités. Par exemple, si l’épreuve du 100 mètres devient trop compétitive, on invente le 100 mètres à quatre pattes, dont un Japonais vient justement de battre le record. On attend maintenant que les successeurs de ce compétiteur prophétique attaquent le record en rampant.

La recette du jour

Métiers d’avenir

Vous êtes conscient que dans tous les secteurs, la compétition est devenue très rude et le niveau d’exigences inaccessible. Préparez l’avenir en rétablissant d’anciennes spécialités. La massue comme arme de guerre ou le char à bœufs comme transport collectif. Renoncez aux lunettes en peau de saucisson comme instrument de prévision : elles sont encore en usage dans les agences de notation.

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