Du liquide pour insolvabl

Du liquide pour insolvables

Bon, apparemment, il n’est pas facile pour le Président français de faire accoucher dame Merkel d’un accord qui comporte au moins la moitié de ses propres gènes. C’est une vieille histoire pour le « couple franco-allemand » : pas suffisamment amoureux pour consentir des concessions mutuelles, pas suffisamment aigri pour accepter le désastre financier d’un divorce. On ne le dira jamais assez : il est téméraire de se marier sous le régime de la communauté. Et puis il y a les enfants : 25 moutards européens, tous adoptés sans distinction de nationalité et sans s’assurer préalablement qu’ils aient été bien élevés. Si bien que dans la portée, évidemment, il y a quelques flemmards congénitaux et pas mal de paniers percés. Allez donc élever une telle famille, quand le papa prêche l’indulgence pour les noceurs impénitents et que la maman veut leur imposer le knout et les priver de dîner. Si bien que le Conseil de famille, sollicité pour éponger les dettes surnuméraires, ne cesse d’être reporté : personne ne veut sacrifier ses biens propres et la dot a déjà été boulottée. En attendant, les casinotiers s’impatientent : ils ont encouragé les flambeurs à s’endetter et voudraient maintenant faire jouer la caution de toute la parentèle. Ce n’est pas très malin de leur part : la famille est moins riche qu’il y paraît.

Sauf à accepter la thèse opportunément distillée par le Center for European Policy Studies (CEPS), un think tank bruxellois qui prospère grâce aux subventions publiques et au mécénat privé. Vous savez, les think tanks sont constitués par accouplement improbable de chercheurs et de lobbyistes, selon la recette du pâté d’alouettes : une alouette de scientifiques pour un cheval de propagandistes. Des faiseurs de gris-gris, pour paraphraser John le Carré. Selon le CEPS, les Etats européens ne souffrent pas d’un problème de solvabilité mais d’un manque temporaire de liquidités. Le même discours que celui qui fut tenu à propos des banques, dès le déclenchement de la crise financière. Bien que ces honorables institutions fussent aussi fortunées qu’un émir du pétrole, il a quand même fallu les recaver sur le dos du contribuable, et il convient maintenant de les recapitaliser par tout moyen restant à inventer. Sans garantir qu’elles échapperont toutes à la noyade. Eh bien, pour les Etats, c’est la même chose : il suffit, selon le CEPS, que la BCE apporte la liquidité temporaire à ceux qui en ont besoin, et ils seront temporairement prémunis contre l’insolvabilité. Astucieux, non ? Mais comment fait-on pour distinguer le besoin de liquidité de l’insolvabilité ? Facile : c’est « une décision politique qui doit être prise par les ministres des Finances qui siègent au conseil du Fonds européen de stabilité financière ». Voilà enfin une heureuse nouvelle : on va pouvoir se passer des agences de notation, ces oiseaux de malheur qui voient partout ruine et désolation.

La recette du jour

Time is money

Vos affaires sont calamiteuses et vous ne pouvez plus honorer vos engagements. Cessez de broyer du noir et cotisez généreusement au Center for European Policy Studies, un organisme de magiciens qui transforment la ruine en besoin temporaire de liquidités. Puis cotisez à nouveau pour que le temporaire devienne définitif – mais le résultat n’est pas garanti.

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