Illusion d'optique

Illusion d’optique

On a peut-être tort de s’inquiéter des conséquences de la crise en cours. Et de la litanie de désordres et de privations qu’elle devrait logiquement entraîner. Non qu’il y ait une chance quelconque que l’on puisse échapper au marasme : les économistes ont depuis longtemps édicté le principe, rarement pris en défaut, selon lequel ce sont toujours, dans leur discipline, les hypothèses les plus désagréables qui se concrétisent. En d’autres termes : la tartine tombe toujours du côté de la confiture. Il est donc totalement improbable que la chienlit ambiante, aggravée par l’obstination des autorités à nier l’évidence, puisse déboucher sur autre chose qu’un méga-bug de très grosse cylindrée. Mais l’intensité des souffrances à en attendre sera directement proportionnelle à la perception qu’auront les gens de la situation. Sur ce terrain, les gouvernements maîtrisent assez bien cette technique de ripolinage du réel que l’on appelle la propagande. L’exercice atteint toutefois assez rapidement ses limites. En revanche, la technologie pourrait se révéler très efficace pour la transmutation des vessies en lanternes.

On doit à des chercheurs de l’Université de Tokyo d’avoir démontré à quel point nous dépendons de nos sens pour appréhender le réel, ce que l’on savait déjà, mais surtout à quel point nos sens peuvent nous berner. En chaussant des lunettes dotées d’un système de « réalité augmentée », entouré de flacons remplis d’effluves appropriés, on accepte comme délicieux un biscuit infect et comme généreuse une portion rikiki – et vice versa. Cette technologie remplace avantageusement les lunettes en peau de saucisson d’autrefois, et les lunettes roses qui leur ont succédé au début des années 1980. En équipant massivement les populations de ces binocles magiques, il doit être possible de bâtir le meilleur des mondes comme dans le roman. On devrait commencer par les tester sur les Grecs : si ça se trouve, ils parviendraient à rembourser leurs dettes sans être tentés par la mélenchonite locale, une affection contagieuse qui ressemble plutôt à un instrument rustique de « réalité diminuée ». Il faut bien le reconnaître : c’est sympa tout de même, la technologie.

La recette du jour

Réalité augmentée

Sans être foncièrement pessimiste, vous avez compris que le pire pourrait bien devenir certain. Il est temps d’augmenter votre réalité pour diminuer vos embêtements. Si vous ne trouvez pas de lunettes japonaises, parfumez-vous à l’éther diéthylique, habillez-vous de chanvre (fumable) et gavez-vous de psilocybes (hallucinogènes). Ça n’ira pas mieux mais vous n’en saurez rien.

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