L'abeille et la sénilité

L’abeille et la sénilité

Voilà longtemps que les abeilles font l’objet de l’affection et de la fascination des hommes. Qui chapardaient sans vergogne la production de ces ouvrières non syndiquées bien avant la naissance de l’industrie sucrière. On a depuis lors découvert leur rôle irremplaçable dans la pollinisation, ce qui nous fait regretter de les avoir décimées avec les poisons ordinaires de l’agriculture productiviste. Mais une autre dimension de l’apis millifera ne cesse de nous passionner : la vie sociale de la ruche. La discipline métro-boulot-dodo de ses occupantes, qui s’activent successivement à nettoyer la maison commune, nourrir la marmaille de la couveuse collective et butiner la campagne environnante sans s’accorder de pause-café. Pendant que la reine se prélasse dans son lit à baldaquin, seule autorisée à la galipette et unique responsable de la ponte des mouflets. L’exemple parfait de la division du travail, qui constitue l’optimum d’une société selon les manuels d’économie. Un optimum que nous n’avons heureusement pas encore atteint : s’il n’y a pas de chômeuses dans la ruche, c’est parce que toute abeille désœuvrée est impitoyablement éliminée.

En dépit des apparences, les abeilles ont un cerveau. Dont un groupe de chercheurs vient de découvrir le moyen de favoriser le rajeunissement. Compte tenu de l’étonnante proximité de notre mode de vie avec celui des insectes mielleux, la découverte est probablement transposable à notre espèce, de plus en plus exposée aux désordres cérébraux de la sénescence. Pour faire rajeunir une vieille abeille, usée par le butinage à la chaîne, il suffit de lui confier la tâche de nourrir et langer les petits. L’amour de son prochain la protège de la folie sénile. Cette avancée de la connaissance est d’une portée capitale pour la sauvegarde de l’espèce humaine. Elle devrait nous permettre d’épargner au élus l’Alzheimer politique qui les guette, après une longue carrière : ils finissent par oublier que leur première mission est d’œuvrer pour l’intérêt général. Au lieu de cela, ils s’affrontent dans des combats meurtriers avec leurs frères en ruche, pour devenir le seul bourdon qui pelotera la reine. Ce comportement attristant est le signe d’une dégénérescence inquiétante. Pour les protéger de la décrépitude, il faudrait leur imposer une thérapie salvatrice : après 25 ans de service, passage obligé dans une crèche ou dans l’enseignement primaire. Afin de les ramener dans le monde des vivants.

La recette du jour

La nounouthérapie

Vous êtes un jeune couple fier de votre progéniture. Mais les enfants sont un sacré problème pour vos soirées en ville. Renoncez aux nounous occasionnelles, plus imprévisibles que vos mouflets. Mobilisez plutôt vos propres parents. Non, ça ne leur fait pas plaisir : ils ont déjà donné avec votre élevage, merci pour eux. Mais vous les protègerez contre leur gré des atteintes de la sénescence.

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