L'hôtel en kit

L’hôtel en kit

Vous avez cru naïvement que le secteur hôtelier avait déjà tout inventé. Qu’il n’était plus possible de créer un nouveau concept tant l’offre est déjà généreuse et diversifiée, du cinq étoiles grand luxe au garni le plus crade. Eh bien, vous aviez tort. Un nouvel entrant vient de s’annoncer sur le marché, où il compte investir 1 milliard d’euros, pour commencer. En Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas, principalement. Il s’agit de la firme Ikea, le très célèbre fabricant de mobilier do-it-yourself. Les caractéristiques de cette nouvelle chaîne n’ont pas été dévoilées ; tout au plus a-t-on compris que les hôtels offriront l’indispensable et banniront le superflu. Mais ils ne seront pas meublés par Ikea, ni ne porteront le nom de l’enseigne. Ce qui est plutôt surprenant : l’investissement est réalisé par Inter Ikea, une filiale du groupe qui a précisément acquis, pour 9 milliards d’euros, le nom commercial de la maison-mère. En échange de royalties annuelles de 3% sur le chiffre d’affaires (d’environ 25 milliards d’euros), ce qui en fait un placement très, très rémunérateur… Mais pourquoi planquer le nom d’Ikea dans un coffre-fort ? Pour en sertir la couronne de la Reine d’Angleterre, comme le Koh I Noor ? Ou pour ne pas le ternir dans une expérience olé-olé ? L’avenir nous l’apprendra.

On se doute quand même que le futur hôtel Ikea-qui-ne-dit-pas-son-nom appartiendra à la catégorie low cost, pourtant déjà bien représentée. Peut-être la chambre ne sera-t-elle pas meublée du tout : un futon dans la baignoire, une cruche d’eau tiède pour la toilette et un rossignol en guise de réveille-matin. Ce qui devrait permettre de loger un couple dans 3 mètres-carrés. Pour pas cher, évidemment. A moins que la piaule ne soit à monter soi-même : voilà qui occupera le client toute la nuit, et même davantage s’il est aussi malhabile que le billettiste. Et au petit matin, épuisé, il ira dormir dans le métro. A l’œil. Voilà sans doute le nouveau concept : un hôtel pour bricoleurs insomniaques et impécunieux. Fallait y penser. S’il est donc un peu tôt pour préjuger de la pertinence de cette nouvelle offre, on peut sans risque saluer la créativité d’Ingvar Kamprad, le fondateur de la firme, en matière de finance. Voilà déjà trente ans que l’entreprise s’est engagée dans l’optimisation fiscale : un écheveau de holdings spécialisées, elles-mêmes détenues par des… fondations (aux Pays-Bas, au Luxembourg ou au Lichtenstein), certaines d’entre elles présentant la particularité d’être totalement exemptées d’impôt et de n’être soumises qu’à des formalités déclaratives simplifiées. Cool. N’ayant pas trouvé la notice détaillée qui permette d’assembler cette usine à gaz, on n’a pu évaluer les économies qui en résultent. Mais elles doivent être substantielles. Suffisantes, en tout cas, pour avoir permis au père Kamprad, authentique self made man, de s’être hissé au 11ème rang des fortunes mondiales. Et l’argent continue de couler à flots, au point qu’il est maintenant contraint d’investir dans l’immobilier, comme un bourgeois ordinaire. C’est déprimant : on partage votre souffrance, Ingvar.

La recette du jour

Menu personnalisé

Vous êtes restaurateur et vous ne savez plus quel concept adopter : même avec le low cost, le pékin trouve encore l’addition trop élevée. Inventez le menu intégralement personnalisé : sous réserve qu’il apporte ses ustensiles et ses ingrédients, le client cuisinera lui-même son repas avant de faire la vaisselle. Vous pourrez enfin planquer vos profits dans une fondation au Lichtenstein et monter une chaîne hôtelière.

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