Le triomphe de Perrette

Le triomphe de Perrette

Quelle allégresse, hier, partout dans le monde ! Ça fait plaisir à voir : jusqu’aux Etats-Unis et en Chine, les autorités ont exprimé leur satisfaction devant les bonnes décisions prises par l’Europe, face aux « défis » posés par l’énormité de la dette, la fragilité de la banque, les angoisses de l’opinion et d’une façon générale, le sentiment que la planète danse sur un volcan. Les Boursiers se sont lâchés en achetant à livre ouvert tout ce qui traînait sur le marché. Notamment les valeurs bancaires, bien que ces institutions aient accepté, à l’insu de leur plein gré, de passer par pertes et profits la moitié de leurs créances grecques. Voilà qui devrait donner lieu à la naissance d’un nouvel adage : qui paie les dettes des autres s’enrichit. C’est assurément la nouvelle la plus réjouissante du demi-siècle écoulé, période pendant laquelle « les autres » ont emprunté jusqu’à l’indigestion. Et ce nouveau paradigme relègue à l’arrière-plan les préoccupations autrefois prioritaires, comme la croissance. Celle de la France, selon l’aveu présidentiel, serait l’année prochaine beaucoup plus mollassonne qu’escompté.

Bon, on s’en doutait un peu, sans disposer pour autant des ordinateurs de Bercy. Dans une société comme la nôtre, chacun peut supporter sans dommages la moindre augmentation de son revenu voire sa stagnation. Tel n’est pas le cas de l’Etat, qui bâtit systématiquement son budget sur un accroissement de la richesse collective, tout en présentant un prévisionnel d’exploitation déficitaire. Cette situation étant quasiment la norme dans tous les pays du monde, et ce depuis longtemps, on s’étonne que les créanciers aient autant tardé à s’inquiéter de la solvabilité de leurs plus gros clients. Puisque les encours de ces derniers sont appelés mécaniquement à prospérer davantage que leurs ressources, arrivera nécessairement le moment où ils ne pourront plus payer. La « règle d’or » de la gestion publique, que dans un sursaut de vertu les Etats-membres entendent constitutionnaliser, est déjà inscrite dans le marbre républicain originel. L’équilibre budgétaire est l’une des premières règles intangibles des finances publiques, comme vous le confirmera n’importe quel étudiant de première année. Et voilà des lustres que nos gouvernements s’assoient dessus sans faire grincer la chaise. Le contribuable contemporain pourra-t-il effacer l’hérésie constante de ses aïeux ? On n’en sait rien, mais l’Histoire introduit le doute. Les populations respectent la vertu financière tant qu’elle n’est pas trop douloureuse. Dans le cas contraire, le problème ne se règle que de deux façons : par la méthode douce de Keynes, avec l’euthanasie inflationniste des rentiers ; par la méthode expéditive de Philippe le Bel, avec la combustion des créanciers. Les paris sont ouverts.

La recette du jour

Ingénierie hypothécaire

Vous avez emprunté plus que de raison au point que vos créanciers mouillent leurs braies. Ne les affolez pas davantage, vous avez encore besoin d’eux. Mettez vos avoirs au Mont-de-piété en échange de nouveaux prêts. Puis offrez une hypothèque sur votre honneur pour garantir votre sincérité : votre honneur ne vaut plus un clou, mais vous êtes le seul à le savoir.

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