Nomadisme et chinoiseries

Nomadisme et chinoiseries

On n’a pas fini d’entendre parler des phénomènes migratoires. Oui, bien sûr, il est question chez nous du périple des Rois mages, mais c’est un phénomène très saisonnier. Au contraire de la Chine, vous l’avez noté dans la presse autochtone qui est confrontée à un flux permanent d’émigration. Depuis longtemps des cohortes entières s’exilaient aux Etats-Unis, en Australie et en Europe, pour échapper aux conditions misérables de leur terre natale. Désormais, ce sont les nouveaux riches qui se font la malle. Et pas pour échapper au terrorisme fiscal, comme vous pourriez le croire : l’administration fiscale chinoise n’a pas encore atteint le niveau de sophistication caractéristique des pays développés. Si bien qu’il est toujours possible d’y faire fortune rapidement, sans trop avoir à cracher au bassinet. Du reste, les capitaux étrangers s’investissent en masse dans le pays, appelé à supplanter bientôt les States au rang de première puissance mondiale. Bref, s’il est un endroit de la planète promis à des lendemains prospères, c’est bien la Chine. Alors pourquoi vouloir quitter cet eldorado ?

Il semblerait que fortune faite dans l’industrie esclavagiste, dans la magouille immobilière ou le pillage des fonds publics, les récents multimillionnaires aspirent à des conditions de vie conformes à leur opulence. Ils veulent échapper à l’environnement dégradé de l’Empire du Milieu, à l’air vicié, aux sols pollués, à l’eau empoisonnée et au climat social délétère. Ils entendent offrir à leurs enfants une éducation de qualité, à leurs épouses des toilettes sophistiquées et à leur argent une meilleure sécurité. Car à Pékin, la Roche tarpéienne est proche du Capitole. En foi de quoi s’envolent-ils en masse vers New York et Sidney, où ils investissent leurs sous dans les actions et l’immobilier. La stratégie est sans doute hasardeuse, mais enfin, ce sont leurs affaires. Il ne manque pourtant pas d’opportunités d’investir en Chine dans les immeubles et ouvrages d’art. Certes, nombre de constructions, de ponts ou de tunnels continuent de s’effondrer, témoignant d’une certaine négligence dans le BTP. Mais cela n’empêche pas le pays d’entreprendre des ouvrages spectaculaires. Avant même qu’y soit édifiée la tour la plus haute du monde, l’immeuble le plus massif de la planète sera bientôt opérationnel : 100 mètres de hauteur, 1.7 million de mètres-carrés sur des fondations de 20 hectares – l’équivalent du Jardin du Luxembourg. Imaginez la tête de nos Sénateurs si un tel paquebot venait faire de l’ombre à leur Palais. On le sait, la course au gigantisme immobilier est généralement annonciatrice d’une forte récession. Il est dangereux de se montrer présomptueux. Ce que devraient méditer les Sénateurs, en ce moment pris de fièvre irrévérencieuse à l’égard du Gouvernement. Car l’honorable institution n’est pas à l’abri d’une récession constitutionnelle.

La recette du jour

Migration des oies

Vous avez accumulé une grosse galette, par des moyens que le business encourage mais que la morale réprouve. Il est temps pour vous de changer d’air avant que les mouches ne changent d’âne. Installez-vous aux Etats-Unis ou en Australie. Vous y côtoierez de vertueux autochtones et des exilés chinois, qui se feront un devoir de vous plumer comme des oies.

deconnecte