Pétune andorrane

Pétune andorrane

Bon, on s’en excuse par avance, mais le billettiste est un peu pressé ce matin : sa leçon de catalan, comprenez-vous. Pourquoi le catalan ? D’abord c’est une langue charmante, qui nous rappelle les patois occitans de notre enfance et les ballades des troubadours moyenâgeux, qui figuraient jadis au programme des humanités. C’était charmant. Mais aujourd’hui, la maîtrise du catalan est devenue une nécessité : on envisage, voyez-vous, de planter nos pénates en Andorre. Pas vraiment pour se remettre au ski, encore que les pistes y soient aussi pépères que la vie publique : c’est l’Etat le plus stable d’Europe depuis le règne de Charlemagne. Les Andorrans ne perdent pas leur temps, ni leur argent, ni leurs amis, ni leur dignité, dans des bagarres électorales de cours de récré. Et personne ne les menace de les écraser d’impôts, de leur sucrer leur retraite ni un « A » de leur signature souveraine. N’ont pas besoin de crédit, les Andorrans. Et si par extraordinaire tel était le cas, ils ont leurs propres banques, saturées de dépôts.

Ce n’est pas non plus pour la prospérité des banques du cru que l’on souhaite s’installer en Andorre. Encore que cette belle santé pourrait s’altérer : on apprend qu’un grand établissement, Crèdit Andorrà, « ha formalitzat l’adquisició del 80% del capital social de Beta Capital Management » (vous voyez que vous comprenez le catalan, vous aussi). Ce n’est pas très prudent, pour les banques paradisiaques, de chercher à s’implanter aux Etats-Unis : quelques exemples malheureux ont méchamment amoché l’opulence et le moral des Suisses – et le feuilleton n’est pas terminé. Chez l’Oncle Sam, l’organisation de la fraude fiscale relève d’un monopole des autochtones : tout Etranger qui s’y essaie s’expose à se faire dépouiller. On n’aimerait pas que Crèdit Andorrà se fasse décaver : c’est là que l’on compte déposer nos maigres économies. Mais enfin, là n’est pas la question. Le vrai problème, voyez-vous, est celui de tout fumeur invétéré : la pétune andorrane est considérablement moins coûteuse que son homologue française, de nouveau surtaxée. Plusieurs milliers d’euros de différence annuelle pour un accro à la cigarette et au havane. Oh, bien sûr, on vous entend d’ici : se priver totalement de tabac génère encore plus d’économies. Facile à dire pour qui n’est pas ou n’est plus concerné. Mais demander aux intoxiqués de longue date de renoncer à la fumée, c’est mission impossible. Autant exiger des banquiers qu’ils abandonnent leurs bonus, leurs stock-options et leurs parachutes dorés, pendant que vous y êtes : même l’évêque d’Urgell n’y parviendrait pas, s’il commettait l’imprudence de s’y essayer.

La recette du jour

Trinxat andorran

Ce n’est pas que vous soyez passionné par la gastronomie pyrénéenne, mais vous appréciez d’aller vous restaurer en Andorre. Le trinxat, en particulier, n’est jamais qu’une potée. Mais le chou y est touché par les neiges, le lard y est gras comme un banquier et l’ail local vous protège des diableries fiscales : avec l’économie sur le prix du havane, vous payez le repas complet.

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