Ramdam autour du tam-tam

Ramdam autour du tam-tam

Un seul appel vous manque, et tout est dépeuplé. Telle est la version contemporaine des angoisses lamartiniennes, confirmée par le bug récent du réseau mobile de France-Télécom (FT). Un silence de huit heures qui a suscité la grogne compréhensible des abonnés : depuis que la communication instantanée est devenue banale, n’importe où ou presque, et à n’importe quel moment, au risque de surprendre le correspondant au beau milieu de sa méditation transcendantale, de sa déclaration d’amour ou de la dégustation d’un Lafite 45 – toutes situations très privées qui requièrent la sérénité -, depuis, donc, qu’il est devenu vital de pouvoir importuner ses semblables en appuyant sur une touche, la privation temporaire de la machine ambulatoire à blablater constitue une affaire d’Etat, une violation de la Constitution, une atteinte aux droits imprescriptibles de l’individu de casser les oreilles à ses homologues. Il faut bien sûr reconnaître que le téléphone mobile est aussi un outil de travail désormais irremplaçable dans certaines professions ; mais l’hypothèse d’un disfonctionnement doit alors être prise en compte, comme une météo défavorable pour l’agriculteur.

L’incident méritait-il qu’une Commission parlementaire fût réunie sur le sujet ? Le bug du tam-tam moderne est-il comparable à un Fukushima nucléaire ? Poser la question, c’est y répondre. Mais les deux événements ont en commun la croyance en la toute-puissance de la technologie, en la maîtrise absolue de toutes les machineries complexes que l’on doit au génie humain. A la nuance près que les conséquences ne sont pas les mêmes entre l’explosion d’une centrale et une panne de téléphone… Le responsable de l’entreprise de télécoms n’a pas tort de demander que l’on minimise la portée de l’événement. Car ce qui est exceptionnel, c’est que les embarras de cette nature soient aussi rares dans le métier. Mais la firme subit la confusion des genres : le quotidien de FT a été émaillé, depuis plusieurs années, de quelques drames qui témoignent d’un malaise social avéré au sein du personnel. Et qui confirment les dommages collatéraux résultant d’une quête obsessionnelle de compétitivité, la pierre philosophale consensuelle des temps présents. Les remous occasionnés par un banal bug technique reflètent ainsi la mauvaise conscience de la société tout entière, qui aspire à jouir de services parfaits et bon marché, sans se soucier du prix à payer par ceux qui les produisent.

La recette du jour

Prévoir l’aléatoire

Vous déplorez que votre potager vous offre le spectacle déprimant de légumes rachitiques et rongés par la maladie. Mais vous avez négligé d’amender le sol, de traiter les plantations, de biner les parterres et de les protéger contre les dommages irréversibles d’un été pourri. Ne vous plaignez pas : vous en avez pour votre argent.

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