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Actualités du droit de la commande publique

En cette rentrée de septembre, et à quelques mois des élections municipales, il n’est pas inopportun de rappeler à tout un chacun, aux décideurs territoriaux comme aux chefs d’entreprise, combien les règles de la commande publique doivent être respectées, en particulier lorsqu’il s’agit de prévenir et d’empêcher le favoritisme et la prise illégale d’intérêt. La responsabilité pénale des décideurs territoriaux et des entrepreneurs n’est pas une simple théorie que l’on enseigne dans les amphithéâtres de la Faculté de Droit. Les conséquences peuvent être notoirement douloureuses.

Ce rappel liminaire effectué, nous vous proposons un panorama de jurisprudence faisant le tour des dernières actualités en matière de commande publique.

Par Maître Alexandre-Guillaume TOLLINCHI, Avocat à la Cour – Docteur en Droit, Avocat associé de la SELARL TOLLINCHI’S LAW FIRM(Barreau de Nice) Enseignant à la Faculté de Droit de Nice

Il convient de rappeler que la plupart des arrêts rendus ces derniers mois le sont encore en application soit de l’ancien Code des marchés publics soit de l’ordonnance de 2015. En effet, le Code de la commande publique n’est en vigueur que depuis le 1er avril 2019. Notons à ce sujet que, depuis un décret de juillet 2019 (Décr. n°2019-748, 18 juillet 2019), les dispositions relatives à la facturation électronique, issues du décret n°2016-1478 du 2 novembre 2016, viennent d’être codifiées dans le Code de la commande publique.

Panorama de jurisprudence de la rentrée 2019/2020

- CE, 12 juillet 2019, n°429782, CNAM :
Les informations communiquées aux candidats doivent être complètes, notamment lorsqu’elles peuvent avoir une incidence sur le coût de transport des biens objet du marché. À défaut, le manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence est constitué.

- CE, 1er juillet 2019, 412243 :
Le Conseil d’État a précisé les conditions du recours "Beziers I" à savoir notamment que l’action des parties à un contrat administratif en contestation de la validité de celui-ci est ouverte pendant toute la durée d’exécution de celui-ci, aucune règle de prescription contraire pouvant alors être opposée.

-  CE 28 juin 2019, n°420776 :
Si la méthode de notation annoncée par l’acheteur public n’est pas respectée par ses services, quoique cela ait pu avoir une incidence sur le classement des offres, le vice du consentement n’est néanmoins pas constitué. Cet arrêt peut prêter le flanc à la critique en ce qu’il n’est pas opportun. Pour autant, l’analyse de la plus haute juridiction administrative fait preuve d’une évidente rigueur juridique : le changement de la méthode de notation ne peut pas, juridiquement, constituer un dol, une erreur, ou une violence. Et il n’est pas envisageable de généraliser les cas d’annulation alors que cette dernière reste et doit rester la sanction suprême. Pour autant, la crainte d’une entreprise candidate de voir changer les règles de notation à la dernière minute, lorsque cela est de nature à favoriser l’entreprise sortante, peut être entendue mais doit être traitée sous l’angle du seul favoritisme, à condition qu’il soit constitué. Mais il ne s’agit pas d’un vice du consentement. L’intervention du législateur serait dès lors souhaitable afin de garantir aux candidats des conditions sereines de candidature et de notation, puisqu’à l’évidence les juges du fond n’ont pas entendu évoquer la notion de favoritisme. Alors que M. Emmanuel Macron, alors Ministre de l’Économie, avait déclaré, dans un discours du 15 avril 2016, que "la commande publique doit nous permettre de faire une politique de développement des PME", insistant notamment sur l’impératif de "sécurité juridique". Manifestement, le gouvernement a encore du travail en la matière.

- CAA Douai, 20 juin 2019, n°17DA00086 :
Une visite de site, qui peut être imposée par l’acheteur public et indiquée dans l’avis de publicité et le règlement de la consultation, n’est pas nécessairement groupée. La jurisprudence fait preuve de souplesse en admettant que l’absence de visite groupée ne présuppose pas que tous les candidats n’aient pas bénéficié des mêmes éléments d’information de nature à leur permettre de formuler des offres adaptées. En outre, si une visite a été faite en retard par rapport à la date et à l’heure fixée par l’acheteur public, cela ne vicie pas la procédure.

- CE, 14 juin 2019, n°41444 :
Aucun texte ni aucun principe n’interdit à une personne publique de se porter candidate à l’attribution d’un marché public ou d’un contrat de délégation de service public, ce afin de satisfaire un intérêt public local. Attention : pour ne pas fausser la concurrence, le prix proposé par la personne publique candidate, qui peut être inférieur au prix proposé par une société privée, doit néanmoins être déterminé en prenant en compte l’ensemble des coûts directs et indirects concourant à sa formation, sans que la collectivité publique bénéficie, pour le déterminer, d’un avantage découlant des ressources ou des moyens qui lui sont attribués au titre de ses missions de service public.

- CE, 12 juin 2019, n°427397 :
Il est possible de fixer un maximum concernant un accord-cadre à l’issue de la procédure de passation et non avant son lancement. L’estimation doit néanmoins être obligatoirement indiquée dans l’avis de publicité.
Ces quelques arrêts ne constituent pas un panorama exhaustif, pas plus qu’une consultation. Il appartient en effet aux décideurs territoriaux et aux candidats éventuels de se rapprocher d’un Avocat exerçant dans le domaine de la commande publique pour toute consultation pré-contentieuse ou pour tout litige.

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