COVID-19 : responsabilité

COVID-19 : responsabilité pénale de l’employeur

La pandémie liée à la COVID-19 pose la question de la protection de la santé et de la sécurité des salariés sur leur lieu de travail.

Par Maître Cécile ZAKINE Avocat au barreau de Grasse Docteur en droit, Chargée d’Enseignement Membre du réseau d’affaires Business Network International - BNI

Les mesures nécessaires pour respecter les gestes barrières et les règles de distanciation devant être adoptées par les employeurs ont été préconisées par le Gouvernement, en particulier les mesures prises. À défaut, la responsabilité pénale de l’employeur est susceptible d’être engagée.

La COVID-19 en tant qu’agent biologique pathogène

Selon les dispositions issues de l’arrêté du 18 juillet 1994 qui fixe la liste des agents biologiques pathogènes, la COVID-19 doit être considérée comme un agent biologique pathogène de groupe II, inclus au Tableau B concernant les virus.
L’article R. 4421-1 du Code du travail prévoit que peuvent être considérés comme exposés au risque biologique les travailleurs dont les fonctions les exposent à un risque spécifique quand bien même l’activité de leur entreprise n’impliquerait pas normalement l’utilisation délibérée d’un agent biologique.
C’est pourquoi, l’employeur doit mettre en place les mesures appropriées pour éviter tout risque de contamination dans l’environnement professionnel.

Les délits en matière de santé et sécurité au travail et l’engagement de la responsabilité de l’employeur

Les infractions commises par l’employeur en la matière sont définis aux articles L.4741-1 et suivants du Code du travail.
L’article L. 4741-2 du Code du travail dispose : "Lorsqu’une des infractions énumérées à l’article L. 4741-1, qui a provoqué la mort ou des blessures dans les conditions définies aux articles 221-6, 222-19 et 222-20 du code
pénal ou, involontairement, des blessures, coups ou maladies n’entraînant pas une incapacité totale de travail personnelle supérieure à trois mois, a été commise par un préposé, la juridiction peut, compte tenu des circonstances de fait et des conditions de travail de l’intéressé, décider que le paiement des amendes prononcées sera mis, en totalité ou en partie, à la charge de l’employeur
".
La responsabilité pénale du chef d’entreprise peut être engagée même en l’absence de dommage, dès lors que le non-respect d’un texte édictant des prescriptions de sécurité ou de prudence a été constaté.
Dès lors, pour ce qui est des infractions d’atteinte involontaire à l’intégrité de la personne ayant causé une ITT supérieure à trois mois (Article 222-19 du Code pénal) et d’atteinte involontaire à la vie, dans le cas où le coronavirus causerait le décès d’un salarié (Art. 221-6 du Code pénal), une faute de maladresse, une imprudence, une inattention ou une négligence est susceptible d’engager la responsabilité de la personne morale ou celle de la personne physique en cas de causalité directe entre cette faute et le dommage.
Aussi, compte tenu des circonstances exceptionnelles dans lesquelles la pandémie du coronavirus a plongé les entreprises, il demeure essentiel que l’employeur qui ne peut placer en télétravail ses salariés puisse mettre à leur disposition tous les moyens de protection nécessaires pour éviter la propagation du virus (savons, gel hydroalcoolique, limitation au strict nécessaire des réunions, recours à la visioconférence, respect des règles de distanciation, limitation des regroupements de salariés, report des déplacements non indispensables, adaptation de l’organisation du
travail notamment par la rotation des équipes, application des distances et gestes barrières pour les postes de travail en contact avec le public) et devra aussi et surtout se conformer à son obligation d’information.
Néanmoins, la question se pose de savoir comment le salarié va pouvoir prouver qu’il a contracté la COVID-19, directement et de manière certaine, précisément sur son lieu de travail.

La preuve semble particulièrement difficile à rapporter mais on pourrait imaginer que l’appréciation in concreto de l’aménagement des locaux et des conditions d’hygiène – notamment par l’Inspection du travail – ou encore l’absence d’élaboration d’un Document Unique d’Évaluation des Risques, qui est pourtant obligatoire conformément à l’article R. 4121-1 du Code du
travail, pourra permettre au salarié d’apporter la preuve d’un lien de causalité directe entre l’exposition professionnelle et la contamination.
Rappelons enfin que le Code du travail impose à chaque salarié de prendre soin de sa santé et de sa sécurité mais également de celles de ses collègues.

Il reste donc à espérer que les employeurs et les salariés coopéreront ensemble dans un objectif de prévention des risques professionnels et de lutte contre la propagation du coronavirus.

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