La fiscalité du sport

La fiscalité du sport

Voltaire plaignait l’homme accablé du poids de son loisir. Aujourd’hui, c’est le sportif professionnel qui est accablé du poids fiscal de son activité principale, dont la durée est nécessairement brève.
A priori, envisager la fiscalité du sport, c’est-à-dire les règles de l’impôt applicables aux organisations sportives (associations, sociétés) et aux sportifs devrait conduire à distinguer deux grandes catégories, d’une part le sport amateur, d’autre part le sport professionnel.

Par Maître Alexandre-Guillaume TOLLINCHI Avocat à la Cour – Docteur en Droit (1), Diplômé en Droit économique du sport Avocat associé de la SELARL TOLLINCHI’S LAW FIRM (Barreau de Nice), Enseignant à la Faculté de Droit de Nice

Pour autant, la première catégorie ne présente pas d’intérêt manifeste pour le fiscaliste : le régime fiscal des associations sportives est, somme toute, assez simple, quoiqu’il faille parfois procéder à des vérifications approfondies en fonction du sport concerné.

Le sportif amateur

En principe, l’association sportive est exonérée d’impôts commerciaux, sauf si elle exerce une activité lucrative (gestion intéressée, concurrence et similitude d’activité avec des entreprises, activité économique).

En ce qui concerne l’organisation de manifestations, l’association sportive ne perd pas son caractère non lucratif par le seul fait d’appeler à la générosité
financière du public. Et, naturellement, une association peut disposer de salariés sans pour autant que son activité soit requalifiée en activité lucrative. En présence d’activités mixtes, il conviendra de déterminer et de calculer l’impôt en fonction du type d’activités. Si l’activité lucrative est accessoire (non prépondérante) et dissociable de l’activité principale, une franchise d’impôts est envisageable voire une sectorisation.
À défaut, le bilan fiscal permettra de déterminer le résultat imposable propre du secteur lucratif. En outre, l’association sportive est exonérée d’impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée pour ce qui concerne les recettes de six manifestations au profit exclusif de l’association et par année (article 261-7-1° du CGI). De manière plus générale, outre cette franchise spécifique, il existe un seuil limite à l’exonération fiscale des recettes d’exploitation d’une association sportive : au-delà de 62 250 euros hors TVA, la franchise s’éteint.
Sans aucune limitation, l’association sportive à but non lucratif doit s’acquitter, dans les conditions du droit commun, des impôts sur le
patrimoine (loyers, placements financiers, etc.).

Le sportif professionnel

La seconde catégorie – celle du sportif professionnel – présente beaucoup plus d’attrait et de liberté, notamment en matière d’ingénierie juridique et fiscale. Le sport professionnel est, depuis plusieurs années, dépeint sous les habits de sport-business, voire de sport-spectacle au sens américain du vocable et non plus au sens latin. Il s’agit d’une activité économique à part entière. Il existe un véritable spectacle sportif et une incontestable consommation du spectacle sportif, à grand renfort de publicité et d’exploitation de l’image de l’événement sportif et encore plus du sportif lui-même.
C’est le football professionnel qui, à notre sens, au regard de l’importance des flux financiers générés par sa médiatisation, constitue le plus immédiat des sports-business, un sport-spectacle divertissant les foules, mobilisant avec ardeur les corps et les âmes, dans un objectif triple de compétition sportive, de divertissement, et de mobilisation économique.

Évoquons donc le footballeur professionnel, bien que le raisonnement s’applique à d’autres disciplines.

Le footballeur professionnel est rémunéré aux termes d’un contrat de travail et perçoit un salaire, soumis aux – lourdes – cotisations sociales. Mais les plus médiatisés, même localement, sont également des sportifs-
interprètes lorsqu’ils exploitent commercialement leurs droits dérivés d’image individuelle et leur part d’image collective de leur équipe !
Outre le salaire, les clubs employeurs peuvent verser également une rémunération aux sportifs salariés au titre de l’utilisation de leur image individuelle et de celle de leur part d’image collective.

Problème  : fiscalement, il s’agit d’une rémunération accessoire au salaire et ces sommes sont soumises aux cotisations sociales. La pratique a donc entrepris de créer des sociétés d’image dont l’objectif était essentiellement de décorréler l’activité salariée de l’exploitation de l’image, pour "optimiser" la situation fiscale du sportif et… du club !
Cette pratique a rapidement et malheureusement été qualifiée de fraude, ce qui a beaucoup nui aux clubs français par rapport à leurs concurrents sur la scène internationale. Le législateur a tenté, dès lors, de mettre en place, dès 2010, un dispositif d’exonération fiscale, qui a, sur la pression des organismes sociaux, rapidement été aboli. Il manque au sportif professionnel français un véritable statut protecteur en matière de rémunération d’image par le club employeur ; le débat demeure.

Cela n’interdit toutefois pas au sportif – devenant alors chef d’entreprise – d’exploiter, indépendamment de tout lien de subordination, son image individuelle par le truchement d’une société d’image même étrangère… et de capitaliser ses droits dérivés d’image, par essence à risque, afin d’en tirer de confortables revenus (marques, produits dérivés, etc.).

Avec le concours d’un Avocat, l’ingénierie contractuelle du droit des sociétés offre aux acteurs du sport professionnel plusieurs cordes à leur arc, lorsqu’il est question d’investir et de patrimonialiser leur courte carrière sportive tout en recherchant l’optimisation fiscale la plus favorable possible.

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