Portrait : Alain Bernard,

Portrait : Alain Bernard, plongeon citoyen

Il a offert vingt années de son existence aux piscines. À cette eau chlorée où, aux quatre coins du globe, ont baigné la sueur de ses efforts et l’amertume de ses sacrifices. La peine de ses échecs et l’euphorie de ses victoires. Deux décennies durant, Alain Bernard n’a vécu que pour la natation, dans sa tête et dans son corps, se bâtissant, au fil des titres et des records, l’un des plus beaux palmarès du sport français. À 37 ans, il nage encore aujourd’hui. Mais son engagement n’est plus seulement physique.

Installé sur la Côte d’Azur depuis son arrivée au Cercle des nageurs d’Antibes en 2006, "le requin blond" a entamé sa reconversion après les Jeux Olympiques de Londres, en 2012. Une nouvelle vie qu’il a placée sous le signe du partage. Et de l’investissement citoyen. "C’est ce qui m’anime désormais", insiste-t-il. "Je veux utiliser mon expérience d’athlète de haut niveau et ma notoriété pour communiquer aux autres les valeurs du sport, qui ont une dimension universelle".

Un vécu à transmettre

Après sa carrière dans les bassins, Alain Bernard a un temps songé à une voie militaire. "J’ai été gendarme adjoint volontaire pendant cinq ans alors que j’étais encore compétiteur. Je songeais devenir pilote d’hélicoptère, mais je me suis rendu compte que cette option risquait de m’éloigner un peu trop du sport". Le nageur s’est alors lancé dans un premier ouvrage de transmission via un rôle de consultant pour la chaîne de télé Eurosport, avant de se tourner vers le monde de l’entreprise. "J’ai animé des conférences lors de séminaires qui mettaient en évidence les passerelles qui peuvent exister entre le milieu du sport et celui de l’économie". Depuis 2015, Alain Bernard réserve aussi une partie de son temps à la jeunesse, puisqu’il anime des stages d’été au stade nautique d’Antibes auprès de nageurs âgés de 10 à 17 ans, pour lesquels il représente bien plus qu’un modèle de technique. "Je veux leur faire prendre conscience que la pratique sportive peut révéler de vraies personnalités. Quand j’étais gamin, j’étais timide et introverti. Le sport m’a aidé à être celui que je rêvais d’être".

Un fauteuil au conseil municipal

Pygmalion des lignes d’eau ? Oui. Mais Alain Bernard voit plus grand depuis les dernières élections municipales, grâce auxquelles il a pu donner une orientation civique à son quotidien, dans l’équipe du maire d’Antibes, Jean Leonetti. "J’avais envie de m’impliquer localement, de servir ma commune d’adoption, la ville où mes performances sportives ont explosé", explique le natif d’Aubagne, qui occupe le fauteuil de conseiller municipal délégué à la jeunesse et à la prévention de la délinquance. "J’ai déjà travaillé sur une action qui, dans le contexte de la crise sanitaire, a permis aux Antibois fréquentant les centres de loisirs de bénéficier d’infrastructures sur la plage de la Salis, mais je me laisse un peu de temps pour faire connaissance avec l’ensemble des rouages administratifs. J’entends ensuite me mettre au service des jeunes en les incluant, en particulier ceux qui sont confrontés aux difficultés de la vie, à des projets de formation autour du sport et de l’art".
Avec sa double casquette d’élu et d’ex-nageur, Alain Bernard suit par ailleurs avec attention le dossier de la rénovation du complexe nautique d’Antibes. "La première phase de travaux, qui concernait les équipements extérieurs à hauteur de 11 millions, est achevée. Elle a donné à Antibes la seule piscine de France disposant de deux bassins de 50 m, avec notamment huit lignes en plein air. Grâce à un travail en amont avec les architectes, nous avons pu intégrer des hublots abritant des caméras qui permettent aux nageurs de faire progresser leur technique par l’analyse vidéo. Durant mon mandat débutera la deuxième tranche, pour 20 millions, qui concernera les installations intérieures".

Des piscines moins coûteuses pour les collectivités

L’investissement est conséquent. "Mais intelligent", insiste l’ancien recordman du monde du 100m nage libre, qui milite pour la multiplication des piscines sur le territoire national. L’enjeu est de taille, puisque ces équipements, souvent considérés comme coûteux pour les collectivités, ont une vocation multiple : favoriser l’éclosion des champions de demain, certes, mais aussi étoffer l’offre sportive des Français et, surtout, "leur donner les moyens d’apprendre à nager dès le plus jeune âge afin de lutter contre les noyades, qui sont encore trop nombreuses".
C’est en ce sens qu’Alain Bernard s’est engagé aux côtés de la société Myrtha Pools pour promouvoir un concept novateur de piscine autoportée en inox et PVC. "Le tarif d’un tel bassin, dans les dimensions de 25x12 m, n’atteint que 3 millions, soit 1 à 1,5 million de moins qu’une construction classique de même taille. Des gains substantiels, soit 100 000 euros par an, sont également attendus en matière d’exploitation".
Il espère à présent convaincre un premier élu. Avec ses arguments financiers. Et le crédit que lui a conféré son passé sportif. Cette célébrité est d’ailleurs une source d’influence qu’il n’a pas fini d’exploiter. Professionnellement et bénévolement. Depuis quelques semaines, Alain Bernard est en effet le parrain de la Société nationale des sauveteurs en mer (SNSM). "Mon objectif est de mettre en lumière la grande utilité de cette association qui vit en majeure partie avec des dons".

Près des bassins ou sur La Méditerranée, les pieds sur terre, dans l’eau douce ou salée, il nous promet que sa grande silhouette va nous rester familière.

Photo de Une : Alain Bernard. DR J.P

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