Edito - Le coup de (...)

Edito - Le coup de poignard dans le dos

Rien ne sert de se cacher derrière son petit doigt : l’assassinat lâche et révoltant de Dominique Bernard, professeur de français au lycée d’Arras, par un jeune sorti de ce même établissement, traduit dans le sang la haine que notre république et la laïcité inspirent aux islamistes radicaux.
Ils ont trouvé dans Mohammed Mogouchkov, jeune Tchétchène élevé en France (!), non pas un penseur structuré du djihad, mais le bras armé inculte et cruel de leur funeste dessein.
Après Samuel Paty, c’est peu dire que ce second passage à l’acte est inquiétant. Car l’on peut imaginer que, nourris aux réseaux sociaux infusant de la haine et manipulant les esprits, d’autres Mogouchkov puissent soudain se « réveiller » partout en France et en Europe, comme on vient encore de le constater à Bruxelles.
Depuis des années, d’obscurantistes fanatiques ont entrepris un travail de sape contre l’Occident, contre les « petits » ou les « grands Satan », pour combattre des valeurs et un mode de vie – égalité hommes-femmes, liberté des mœurs, etc. - qui les révulsent. Ils font une guerre de « civilisation », pour imposer une théocratie universelle, une dictature des esprits.
L’exact opposé de nos « Lumières ».

Le politique ne peut rester sans réagir. C’est une obligation, le berger devant tout mettre en oeuvre pour protéger son troupeau. C’est aussi dans le même temps un piège terrible tendu à notre société, ouverte et démocratique, qui permet à chacun de croire et de pratiquer – ou pas - sa religion dans la sphère privée.
On entend Gérald Darmanin réclamer «  l’expulsion systématique de tout étranger (...) considéré comme dangereux par les services de renseignement ». On entend l’imam de Drancy demander plus de fermeté au gouvernement. On constate aussi la sidération, l’incompréhension et parfois la colère de la rue. Face à ces événements, la tentation est grande de durcir à l’extrême, et même de remettre en cause des libertés collectives et individuelles, au nom de la sécurité.
Si cela devait arriver, les terroristes auraient gagné une bataille.
Qu’ils veuillent «  tuer la République, faire de notre jeunesse une génération d’incultes et d’ignorants », qu’ils « cherchent à nous diviser, souhaitent la guerre civile, la confrontation, faire de nous des racistes, des islamophobes  » (1) n’est un secret pour personne. Le défi est de défendre nos valeurs et le droit qui permet à tous, avec nos différences, de vivre ensemble le mieux ou le moins mal possible.
En France, le plan Vigipirate a été placé en « niveau urgence attentat déclaré ». Le gouvernement va présenter son texte sur l’immigration comme une réponse au terrorisme avec une adoption espérée d’ici la fin de l’année, au besoin avec le 49.3, tandis que la droite réclame une réforme constitutionnelle suivie d’un référendum.
Oui, «  l’Europe est bousculée ».
Gardons-nous des amalgames : dans leur immense majorité, les musulmans de France ne partagent pas l’extrémisme du Hamas et des groupes radicalisés. Ils vivent tranquillement ici, où souvent ils sont nés. Nous diviser, jeter la fraternité par dessus la haie pour quelques rares soldats perdus, serait nous perdre.
C’est ce que l’ont doit a minima aux professeurs Paty et Bernard.

J.-M. CHEVALIER


(1) Hassen Chalghoum, imam de Drancy, dans Le Figaro du 14 octobre.

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