Le crépuscule des Dieux
- Par Jean-Michel Chevalier --
- le 10 juin 2024
Alors qu’une logique élémentaire devrait l’inciter à se rassembler pour créer un élan et espérer empêcher au soir du 7 juillet ce qui ressemble déjà à la chronique d’une catastrophe annoncée, la droite continue à se diviser autour des égos et ambitions de chefs qui visent - toujours et déjà - l’Élysée en 2027. Un objectif, qui ne saurait être atteint sans retenir les leçons de ces dernières années, pendant lesquelles la colère contre Macron a été entretenue par les crocs-en-jambe de leaders eux-mêmes en grande perte d’influence qui ne virent pas, ce faisant, qu’ils se tiraient une balle dans le pied.
Le dernier épisode – qui n’a, reconnaissons-le, pas influé sur le résultat des Européennes – a été le refus catégorique à quelques jours de l’élection de Gérard Larcher (LR) d’abandonner son confortable fauteuil du Sénat pour celui plus urticant de Matignon. Il y avait péril en la demeure, tous les sondages le disaient. Les positions politiques des Républicains étaient pourtant moins éloignées de celles du parti présidentiel que leurs postures ne le suggéraient. Mais réussir un coup de billard à trois bandes demande du talent et de la chance, c’est ce qui a manqué.
À force de répéter qu’ils sont malheureux, promis au déclassement, menacés de tout et surtout du pire, que les ruelles de nos villages sont devenues des coupe-gorge comme les favelas de Rio, les Français ont fini par le croire. Ils ont donc choisi dimanche un avenir qu’on leur fait miroiter meilleur. Des promesses de prestidigitateurs auxquelles une majorité d’électeurs veut croire après tant de déceptions et de déconvenues.
En balayant devant sa porte, le Macronisme trouvera le gros tas des colères accumulées depuis les Gilets jaunes. La réforme des retraites et celle de l’indemnisation du chômage étaient, sans doute ou peut-être, nécessaires, mais la façon dont elles furent menées éroda la confiance de ceux qui espéraient « en même temps » une politique économique efficace et une dimension sociale. Arc bouté sur ses certitudes, le président s’est peu à peu coupé des soutiens de centre gauche qui lui manquent aujourd’hui. Les autres courants de la droite traditionnelle n’ont pas voulu d’alliance avec celui qu’ils suspectent de vouloir les absorber. Pas de majorité à l’Assemblée, un climat électrique entretenu par les extrêmes : on ne mesurait que trop l’empêchement d’agir dans cette fin de quinquennat crépusculaire. Elle devient maintenant à hauts risques avec la dissolution qui propulse le pays vers l’inconnu.
Macron avait-il d’autre choix ? Pas sûr.
Il a jeté par-dessus les fourrés sa conviction initiale « à élection européenne, conséquences européennes » en ramenant, à notre plan national, les effets d’une déroute électorale. C’est une grosse prise de risque. Avant de partir en vacances, les Français devront se choisir un destin en élisant de nouveaux représentants. Un pari, qui engage l’avenir du pays bien au-delà... des calculs politiciens des grands chefs de petits partis.
Jean-Michel CHEVALIER