Nice et Grasse : ils (...)

Nice et Grasse : ils ont "cheminé" pour le retrait de la réforme

Les Avocats, Magistrats et Greffiers en robe noire, et les personnels du ministère ont manifesté contre un projet jugé dangereux pour la Justice.

"Nous ne sortirons qu’à la force des baïonnettes !"

De gauche à droite, les Bâtonniers Videau-Gilli, Cesari et Randon, dans la salle des pas perdus, appelant ce lundi à la mobilisation de la profession. (JMC)

Paraphrasant Mirabeau, les Avocats qui ont occupé lundi la salle des Assises du palais de Justice de Nice étaient surtout très en colère des propos tenus par le président Véron. Ayant peu goûté la demande de renvoi du procès en appel présentée par le Bâtonnier Cesari, entouré par de nombreux Avocats en grève, le président a piqué la mouche, utilisant des mots jugés "particulièrement blessants et injurieux" par les conseils niçois, surpris par une réaction aussi vive chez un magistrat connu et apprécié pour son sens de l’humain et de la mesure. "Vous êtes la honte de votre profession, des cheminots en robe noire" a t-il asséné avant de quitter la salle. Après trois heures de flottement, le procès a été finalement renvoyé.

Une manif en ville

Depuis, la mobilisation des avocats n’a pas baissé, bien au contraire. Ils ont même trouvé dans cet épisode vaudevillesque une nouvelle occasion de
resserrer les rangs. Plus que jamais vent debout devant cette réforme "préparée en catimini", "dangereuse pour les droits de la défense et de la démocratie", "s’éloignant du justiciciable".
Dès potron-minet, ce mercredi à Nice, le Bâtonnier Cesari entouré de quelques avocats est venu cadenasser les grilles du Palais de Justice. Un geste symbolique, pour dire que l’institution ne pourra pas fonctionner normalement tant que les avocats poursuivront leur grève illimitée.
Présents sur place, des policiers ne sont pas intervenus. Les portes du tribunal n’ont recouvré leur liberté de s’ouvrir qu’une heure et demie plus tard.
À midi, rejoints par l’intersyndicale des Magistrats, Greffiers et personnels, les Avocats ont conduit la manifestation qui allait arpenter deux heures durant le boulevard Jean-Jaurès, la place Garibaldi, le MAMAC, le boulevard Félix-Faure et revenir se disloquer devant le Palais de justice.

Le Barreau de Grasse défile à Cannes

Le maire de Cannes, David Lisnard, est venu apporter son soutien au Bâtonnier de Grasse Roland Rodriguez et aux manifestants. (Photo DR Ville de Cannes)

Les Avocats du Barreau de Grasse n’ont pas été en reste. Très mobilisés également, ils avaient assuré qu’il ne tiendraient aucune audience, dans le secteur assisté comme dans le secteur libre, devant toutes les juridictions du ressort (Antibes, Cannes, Grasse, Cagnes sur Mer). Ils se sont rassemblés en début d’après-midi sur le boulevard Carnot autour du Bâtonnier Roland Rodriguez pour se rendre ensuite en ville. Où ils ont reçu le soutien de David Lisnard, venu en voisin de la mairie, à la rencontre des manifestants réunis sur les Allées de la Liberté. Il leur a confirmé son total soutien "pour une justice de proximité autonome" et pour "le maintien en l’état du Tribunal de Grande Instance de Grasse".

#Justice morte : les robes noires dans la rue !

Les enjeux sont trop importants : la pluie n’a pas démobilisé les professions du Droit qui sont descendues dans la rue ce mercredi à l’occasion de la manifestation nationale organisée par une large intersyndicale contre le projet de réforme de la Justice défendu par la Garde des Sceaux.
Un mot d’ordre qui a été très suivi à Grasse et Nice, où non seulement les Avocats n’ont assuré aucune prestation devant les tribunaux, mais où ils ont pris la tête des cortèges qui ont sillonné les villes à la rencontre du public.
Des manifestations "bon enfant", avec sifflets, ballons et fumigènes, à la façon des "cheminots" lorsqu’ils se mettent en grève. Mais, derrière ce folklore, une vraie détermination à sauver la justice de proximité, à pouvoir discuter avec la Chancellerie lors de vraies concertations et autres revendications qui ont trouvé, ici dans les Alpes-Maritimes, un écho particulier auprès des Avocats, Magistrats et Greffiers, nombreux à "ne rien lâcher" pour les justiciables et pour une vraie démocratie.

Les mêmes feux de détresse que ceux des cheminots sont allumés par les Avocats lors de leur passage sur la place Garibaldi à Nice. (JMC)

Nos échos

- À en juger par la détermination des Barreaux dans la France entière - et en particulier de ceux des A-M - Nicole Belloubet aurait bien tort de parier sur un essoufflement rapide du mouvement...

- À Nice, les manifestants avaient préparé des chansons et distribué des photocopies pour que chacun puisse chanter tout le bien qu’il pense de la réforme. Sur la place Garibaldi, les "robes noires" ont même entonné une vibrante Marseillaise. Un autre "tube" a été chanté en cœur sur l’air de
"Pirouette-cacahouète". La chorale des professions de justice est née !

- Slogans entendus dans les défilés : "Un seul juge pour juger, t’as intérêt à bien tomber !", "Des euros, pas des robots", "Numérique partout, justice nulle part !", "Fusion, attention : on nous prend pour des pions", "On marche pour vos droits".

- "Je suis très fier de mon Barreau, qui s’est fortement mobilisé pour exiger le retrait du projet. Je vous demande de venir demain à 8h30 devant le Palais de Justice pour continuer ce mouvement". Le Bâtonnier Valentin Cesari, lors de la dislocation du cortège.

- L’intersyndicale doit se réunir (en grand secret) pour définir les prochaines actions. "Rien ne doit filtrer pour garder l’effet de surprise" précise un Magistrat. Petit cachottier...

- Les manifestants attendaient avec impatience les précisions sur le projet de réforme qui devait être présenté en Conseil des ministres au moment même où ils défilaient dans les rues.

deconnecte